Fort d’Eben Emaël, une forteresse imprenable

Construit entre 1932 et 1935 par l’Armée belge pour verrouiller la frontière entre Liège et Maastricht face à la menace allemande, le fort d’Eben Emaël contrôle directement le confluent de la Meuse et du canal Albert dont il interdit le franchissement. Sa conception, ultra moderne pour l’époque, est un modèle du genre et il est cité en exemple à travers toute l’Europe durant les années 1930.

La forteresse, qui s’étend sur plus de 700 m d’est en ouest et sur 900 m du nord au sud,  occupe une éminence rocheuse qui domine la partie la plus importante du canal Albert . Une imposante carapace de béton armé protège les organes de combat affleurant en surface, mais la partie vitale est constituée par des installations et des galeries souterraines qui courent sur plus de 66 hectares sous le plateau et comporte plus de 5 km de galeries.

A l’est, la position est défendue par un à-pic de 40 m qui surplombe la profonde saignée du canal Albert, interdisant toute  escalade. Au nord-ouest, les ingénieurs ont surélevé le lit de la rivière Jeker et renforcé la défense par une tranchée aux remblais abrupts. Les approches sont barrées par un large fossé inondé flanqué par une casemate. Au sud et à l’ouest, le terrain, moins exposé car tourné vers la Belgique, se trouve au même niveau que la plaine environnante, si bien que les Belges ont élevé un mur de 4 m de haut et creusé une large tranchée antichar ceinturant la position.

Etablie sur plusieurs niveaux, la forteresse comporte pas moins de 64 positions renforcées disposant d’un armement très varié. L’artillerie de l’ouvrage comprend quatre casemates triples, armées chacune de trois pièces de 75mm, qui couvrent un secteur de feu différent. A cela s’ajoutent deux tourelles à éclipse équipées chacune de 2 pièces de 75 mm, capables de tirer tout azimut pour défendre notamment le canal et les ponts sur la Meuse. Et comme si cela ne suffisait pas, les Belges ont installé au milieu du vaste plateau sommital une énorme coupole cuirassée armée de 2 pièces de 210 mm qui permet de battre la région sur 360°. Des casemates armées de canons antichars et de mitrailleuses protègent le périmètre de l’ouvrage, auxquelles s’ajoutent de nombreuses cloches blindées permettant le tir ou l’observation.

Toutes les pièces sont protégées par de lourds cuirassements en acier et par d’épaisses masses couvrantes en béton armé, avec des secteurs de feu préparés. Certains des cuirassements atteignent 300 mm d’épaisseur. Des champs de mines et de longs réseaux de fils de fer barbelés complètent la défense du périmètre, pour canaliser tout assaillant vers des blockhaus hérissés de canons antichars et de mitrailleuses.

L’entrée principale, au nord-ouest, s’ouvre à contrepente, au point le plus éloigné du canal. La garnison, qui comprend en théorie un effectif de 1200 hommes, est commandée par le major Jottrand.

L’ensemble est si bien conçu et si puissamment armé que le fort est jugé inexpugnable par les militaires et les spécialistes de l’époque.

Toutefois, si l’ouvrage semble parfaitement en mesure de résister aux bombardements les plus violents et à des assauts terrestres massifs, la possibilité d’une attaque aéroportée semble avoir été totalement oubliée. Les concepteurs ont notamment négligé la défense rapprochée des installations de surface. Les mines, les tranchées et les réseaux de barbelés sont inexistants sur le plateau sommital qui forme la superstructure de l’ouvrage. Quant à la défense antiaérienne, elle est réduite à sa plus simple expression avec seulement trois affûts doubles.

Les Allemands, qui connaissant cette faiblesse, décident de l’exploiter pour neutraliser le fort par une attaque aérotransportée destinée à surprendre et à paralyser les défenseurs. L’opération, dont dépend le déroulement de la campagne à l’ouest, est vitale pour la réussite du Fall Gelb. Elle  doit intervenir dans les premières heures de l’attaque,  de façon à ouvrir la voie pour les troupes terrestres traversant les Pays-Bas. Etant donné son caractère délicat, elle est confiée aux célèbres Fallschirmjägerkorps du général Kurt Student. Mais cela est une autre histoire que vous pourrez découvrir sur ce site dans le sujet intitulé « 10 mai 1940 : l’assaut d’Eben Emaël»…

Essais de l’obus RÖCHLING sur le Fort d’Aubin-Neufchateau – Liège – Belgique

Historique

Quelle que fut la route prise par l’armée allemande pour envahir un pays voisin, elle devait se heurter à des fortifications de béton: la position fortifiée de Liège, la Ligne Maginot, les fortifications tchèques en furent des exemples bien connus.

En 1914, les Allemands avaient produit la « Grosse Bertha », obusier Krupp de 420 mm, pour bombarder les forts de Liège et de Verdun.

En 1940, le rythme des opérations allait être beaucoup plus rapide, ce qui signifiait que l’on aurait besoin d’armes ayant une plus grande mobilité. Dans ce cas, pour venir à bout du béton, il fallait quelque chose de plus « scientifique » que la simple force des obus de 420 mm de 1914. La technique appliquée lors de la prise du fort d’Eben-Emael était exceptionnelle: elle ne pouvait convenir en toutes les circonstances. De plus, elle relevait d’une ruse de guerre assez facile à parer dans l’avenir.

Malgré ce spectaculaire fait d’armes et bien que la Ligne Maginot eût été contournée, l’armée allemande poursuivait ses recherches en vue de perfectionner son artillerie, de façon à pouvoir détruire les objectifs les plus résistants.

II est toutefois intéressant de signaler qu’un régiment a été engagé du 12 au 28 mai 1940 contre les forts de Barchon, Battice, Aubin-Neufchâteau, Evegnée et Pontisse. Son artillerie comprenait entre autre la batterie n° 820 (1 mortier de 420). Cette batterie, située en territoire néerlandais, probablement aux alentours d’Eisden, tirait des obus de 1003 Kg, alors qu’en 1914 les obus de 420 mm type M tirés sur les forts de Pontisse et Loncin ne pesaient « que » 800 Kg. Cette batterie de 420 fut envoyée en France pour hâter la reddition de la Ligne Maginot, elle tira dans le secteur fortifié d’Haguenau sur les ouvrages du Four à Chaux, Hochwald et Schoenenbourg.

Les origines

Les aciéries Röchling de Düsseldorf (dans la Ruhr) étudiaient par ailleurs le moyen de vaincre le béton et l’acier par des tirs de canons, ce qui les avait amenés à reconsidérer le problème à partir de ses données fondamentales en tenant compte des connaissances récemment acquises.

L’obus type anti-béton était alors un projectile à tête conique, fabriqué en acier résistant à une pression d’environ 7 T/cm² et contenant assez peu d’explosif à haut rendement, ce dernier étant allumé par une fusée de culot. Afin d’améliorer ses qualités aérodynamiques, la tête conique était coiffée d’une fausse ogive en acier. C’était en fait un dérivé de l’obus anti-blindage dont il différait surtout par la forme de son nez et par sa charge explosive un peu plus puissante.

Le principe de base était simple : concentrer le maximum d’énergie explosive dans la pointe du projectile. Suivant l’expérience acquise, la force de pénétration devait augmenter de ce fait dans la proportion de P/D³, P représentant le poids de l’obus et D son diamètre. Cependant, tant que le projectile était tiré par un canon rayé classique et tournait donc sur lui-même, son poids était limité car son diamètre était déterminé impérativement par le calibre du tube; sa longueur ne pouvait dépasser cinq à six fois son diamètre sans risquer des oscillations dans sa rotation, ce qui se traduirait par une trajectoire instable et imprécise.

Röchling résolut le problème en dessinant un obus très long, stabilisé sur sa trajectoire par des ailettes fixées à son extrémité. Prévu pour l’obusier standard de 210, cet obus n’avait qu’un diamètre de 170 mm, mais sa tête, très dure, était munie d’un manchon de 210 mm correspondant au calibre du tube. Un manchon semblable entourait son extrémité, enserrant les ailettes en acier ressort. Lorsque l’obusier faisait feu, les deux sabots étaient éjectés de l’obus. Au moment où celui-ci sortait de la volée, les ailettes se déployaient et maintenaient le projectile sur sa trajectoire. Cet obus avait une longueur de 2,59 m, -soit 15,25 fois son calibre, et pesait 193 Kg, de sorte qu’arrivé au but avec une trajectoire finale presque verticale (le projectile atteignait la stratosphère), son énergie cinétique était d’environ 32.000 T/m, soit près de 70 T/cm².

Les essais

En 1941, des essais furent entrepris dans le plus grand secret sur le fort de Battice. Les projectiles étaient tirés par un obusier de 210 mm monté pour la circonstance sur chemin de fer, situé à Merkof près d’Aubel. Ceux-ci avaient une force de pénétration si considérable qu’ils traversèrent en moyenne 30 m de terre et de craie, le toit de la galerie, le radier de celle-ci pour s’arrêter finalement à 5 m sous celui-ci. Des essais eurent lieu à trois reprises et à chaque fois une équipe spéciale ramassait et emballait les morceaux et éclats de ces obus tandis qu’était effectuée la réparation des dégâts afin qu’ils ne fussent plus visibles.

Aujourd’hui, en faisant très attention, on peut encore repérer les traces de passage de ces projectiles. Par exemple :

– dans la grande galerie des 120 entre B Nord et B Sud

– au local à munitions de l’A Nord (réparations au toit du local, aux trois étagères, au sol du local)

– au sommet du bâtiment V, deux réparations, l’une suite à l’enlèvement de la cloche d’observation du bloc, l’autre là où est entré l’obus.

Les essais furent alors déplacés sur le fort d’Aubin-Neufchâteau, la zone de Battice ne pouvant être bloquée éternellement, car étant située sur un axe de circulation important.

La caserne souterraine fut prise pour cible. Les résultats furent très impressionnants, les voûtes des locaux furent trouées de part en part, les plafonds effondrés, le sol bouleversé. Une fois les essais terminés, une équipe entreprit la réparation des dégâts mais elle abandonna vu leur ampleur.

Leurs utilisations

Quelque 8.000 de ces obus furent fabriqués et stockés, très peu furent utilisés. On pense que quelques uns d’entre eux furent tirés sur la forteresse de Brest-Litovsk, lors de l’avance allemande en Russie (1941). On ignore cependant quels résultats ils permirent d’obtenir.

Puis Hitler, ayant appris de quelles performances ces obus étaient capables, en interdit l’emploi sans son autorisation personnelle et formelle: il craignait, en effet, qu’un projectile non éclaté tombât entre les mains des Alliés, qui auraient pu en copier les particularités pour en faire usage contre les défenses allemandes. Comme les commandants répugnaient à demander une telle permission, ces obus tomberont petit à petit dans l’oubli et ne furent jamais utilisés.

Remarques

La visite de cet ouvrage d’artillerie est extrêmement intéressant, car les essais allemands de l’obus Röchling sur ce fort sont encore visibles actuellement et à notre connaissance, c’est le seul endroit où l’on peut voir les dégâts occasionnés par cette munition et surtout où l’on peut visualiser des obus Röchling. En effet, les obus qui étaient tirés à partir d’un canon sur rail de 210 mm sont encore en partie visibles, car certains obus ne possédaient (volontairement) aucune charge explosive et ne servaient qu’à mesurer la pénétration de ceux-ci dans le sol et le béton (environ 30 mètres de béton armé et de terre). D’autres obus avaient une charge explosive et ont occasionnés de gros dégâts dans l’infrastructure de l’ouvrage. On peut voir des obus encastrés dans le béton (voir les photos) et il n’est pas recommandé d’essayer de les manipuler, car on ignore si ceux-ci comportait une charge explosive ou pas !!

La partie du fort non touché par ces essais allemands est encore visitable, mais bien abimé et pratiquement vide.

Nous avons eu le privilège de visiter cet ouvrage guidés par notre ami Jean Puelinckx, qui est l’un des meilleurs connaisseurs de la fortification en général et en particulier de l’obus Röchling. …

Monastère fortifié de Rossanou – Météores – Grèce

Dès le Moyen Age, certaines congrégations religieuses cherchèrent refuge dans les montagnes afin d’ échapper aux incessantes invasions et aux affres de la guerre. Pour se prémunir contre le pillage, les saccages et les violences du siècle, les moines construisirent des monastères fortifiés qu’ils établirent dans des contrées reculées, sur des îles ou très haut dans la montagne. Reculés au fond de profonds canyons, perchés sur de vertigineuses parois ou juchés sur des pitons rocheux inaccessibles, ces nids d’aigle sont défendus par de solides murailles qui prennent directement appui sur le roc et qui montent très haut vers le ciel. Leur base est totalement aveugle et n’offre aucune ouverture à un éventuel assaillant. Pour mieux se prémunir contre les risques d’attaque, aucun sentier ne conduisait à ces forteresses religieuses (les sentiers existants aujourd’hui sont modernes). Le seul moyen d’y accéder était de suivre d’étroites vires rocheuses suspendues sur le précipice, puis de prendre place dans un panier que les moines hissaient le long de la paroi à l’aide d’un treuil… Les plus beaux exemples de ces monastères se trouvent dans le massif des Météores, dans le nord de la Grèce. Nous vous en présentons ici quelques exemples…

Monastère fortifié de Varlaam – Grèce

Le monastère fortifié de Varlaam est situé dans le massif des Météores, dans le centre de la Grèce. Les moines orthodoxes s’étaient réfugiés sur ce vertigineux piton rocheux non seulement pour s’isoler du monde, mais aussi pour se mettre à l’abri des incursions et des brigands qui infestaient la Grèce du Nord.

Le piton qui porte le monastère est séparé du massif par une profonde entaille rocheuse qui forme un fossé naturel. On franchissait cette coupure naturelle par une passerelle dont une partie était escamotable et que l’on retirait la nuit et en période de danger. Une fois passé cette première défense, on ne pouvait accéder au plateau sommital que par un monte-charge installé dans une tour surplombante, grâce à un panier en osier suspendu à une corde relié à un treuil. Ce dispositif, qui ne permettait de hisser qu’un seul moine à la fois ou des provisions, a depuis lors été remplacé par un vertigineux escalier taillé en encorbellement dans la falaise.

LE PISTOLET DE COMBAT SIG SAUER P 220 – Armée suisse

Quand le temps fut venu pour l’armée suisse de changer son pistolet réglementaire pour une arme de service plus fiable que le Parabellum 7,65, la Schweizerische Industrie Gesellschaft de Neuhausen am Rheinfall offrit le SP 47/8, un automatique de calibre 9 mm dérivé du PA 35 A de Charles Petter. Très bien conçu, admirablement réalisé dans les meilleurs matériaux, le SP 47/8, ou SIG P 210, acquit lentement une réputation d’exception parmi les tireurs et les amateurs. Aujourd’hui, le P 210 constitue une classe à part parmi les pistolets, et une référence en matière de qualité.

Mais il constitue aussi une référence en matière de prix, même pour l’armée suisse. La décision fut alors prise de des­siner un modèle plus simple, plus mo­derne, et surtout moins cher à fabriquer : toutefois, la mise en chantier d’un engin nouveau constitue toujours une opération coûteuse que seule peut amortir une large diffusion.

Or les règlements fédéraux, très contrai­gnants et fort limitatifs pour tout ce qui concerne l’exportation d’armes, fermaient de fait le vaste marché international né­cessaire à la rentabilité de l’opération.

La difficulté fut tournée par un accord avec la firme allemande Sauer & Sohn : les ingénieurs suisses de la S.I.G. dessi­naient le pistolet et les Allemands le fa­briquaient. Du coup, le nouveau venu pre­nait l’appellation de SIG-SAUER P 220: des ateliers furent spécialement montés pour sa production à Eckernförde et le marché commercial civil disposait des premiers exemplaires vers la fin de 1975. Notons que ce modèle est vendu aux U.S.A. sous la marque Browning Arms et qu’il est disponible en 45 (11,43mm), 9 mm Luger et 7,65 Luger. Avec un ca­non un peu plus court, il prend le nom de P 225.

Nous avons retenu pour nos essais la ver­sion standard – canon de 112 mm – en 9 mm Luger.

DESSIN ET CONCEPTION GÉNÉRALE

Du point de vue technique, le P 220 est un Browning, c’est-à-dire à culasse calée et déverrouillage par abaissement du ca­non. C’est son seul point commun avec le P 210, si l’on excepte la similitude des désignations en P 200. Mais on ne re­trouve ni la platine amovible, ni la culasse enserrée sur toute la longueur des rainu­res de guidage par la carcasse. P 210 et P 220 sont deux armes basées sur le même principe, mais réalisées de manières totalement différentes.

Comme dans tous les systèmes Brow­ning, le canon est accroché à la culasse au moment du tir. Au départ du coup, les deux reculent ensemble sur 3 mm environ, puis la tranche oblique du renfort inférieur de la chambre vient rencontrer la pente du bloc lié à la carcasse : cet engagement provoque l’abaissement du canon qui se dégage alors de la culasse au bout de 3 mm encore de course. La culasse pour­suit seule son mouvement arrière, ex­trayant la douille qui est éjectée en fin de parcours. Le ressort récupérateur ramène alors l’ensemble vers l’avant ; une cartou­che est poussée du chargeur dans le ca­non, puis la culasse rencontre celui-ci et le pousse en avant. La face pentée, à l’avant du renfort, porte alors sur l’axe d’assemblage et fait remonter le canon dont la découpe supérieure vient se placer dans la tranche antérieure de la fenêtre d’éjection. Canon et culasse sont de nou­veau liés, le chien a été armé pendant la phase de recul et l’arme est de nouveau prête au tir. Le cycle recommence jusqu’à épuisement du chargeur.

Le départ est à double action : le premier coup peut être tiré chien abattu, puisqu’une longue pression sur la détente commence par faire reculer celui-ci avant de le laisser se rabattre sur le percuteur. Ce système, comportant très peu de pièces, apparaît directement inspiré par celui du Mauser HSc de 1940. Il n’y a pas de sûreté manuelle, mais un levier de désar­mement qui fait retomber le chien dans la première encoche tout en bloquant le percuteur. Celui-ci n’est d’ailleurs libre que si la détente est tirée à fond.

MATÉRIAUX ET EXÉCUTION

A l’inverse du 210, son prédécesseur, le 220 est entièrement bâti selon les techniques de fabrication dites modernes : tôles pliées, alliages légers, pièces frittées, goupilles fendues et ainsi de suite.

Ainsi, la glissière est constituée d’une tôle de 2,4 mm formée à la presse et fermée à l’avant par un bouchon d’acier qui lui est soudé ; ce bouchon est percé de deux trous, un pour le canon, un pour la tige du ressort récupérateur. La culasse proprement dite est un rectangle d’acier usiné, accroché à la glissière par un tenon faisant saillie à l’avant et maintenu en place par deux goupilles en tôle roulée enfoncées l’une dans l’autre. Ce bloc de culasse qui porte l’extracteur et le percuteur avec sa sûreté est bien travaillé, mais la glissière proprement dite n’est que sommairement finie. Une bonne chose toutefois : cette glissière est liée à la carcasse par des rainures de guidage qui courent sur toute la longueur. Le canon, long de 111,8 mm, y compris le renfort postérieur, est fort épais à la chambre (16,7 mm) et d’un bon diamètre dans sa partie cylindrique (13,5 mm). Les 6 rayures à droite sont honnêtement tracées, sans plus, un peu écrasées dans le cône de forcement et de profil discontinu. La liaison avec la culasse est réalisée par le décrochement entre chambre et tube proprement dit, ce décrochement servant de tenon de verrouillage. Ce procédé plus simple que les trois tenons habituels, est aussi efficace et tout aussi solide. Le renfort inférieur, sous la chambre, avec sa découpe oblique, est très bien usiné. Une fois mis en place, le canon ne présente aucun jeu avant-arrière et peu de jeu latéral.

La culasse est faite d’un bloc d’alliage léger coulé, d’aspect sobre et net, avec des parois épaisses. La forme a été conçue dès le départ pour l’aluminium. Les rainures de guidage courent d’un bout à l’autre de la partie supérieure, ce qui assure un très bon maintien de la culasse. Un bloc d’acier usiné, accordé aux découpes du canon, sert à la fois de rampe de déverrouillage et de rampe d’alimentation ; il est maintenu dans la carcasse par l’axe d’assemblage et a pour but d’éviter le frottement acier sur aluminium au moment où le canon doit être abaissé.

Le mécanisme, tôles pliées et pièces frittées (obtenues par compression à haute température de poudre d’acier), comprend peu de pièces assemblées selon un dessin très bien conçu. En double action, la barrette de transfert liée à la détente se déplace vers l’avant et, prenant le chien par en dessous, elle le fait basculer en arrière. Le petit levier qui sert d’éjecteur fait aussi arrêtoir de culasse en fin de chargeur.

UTILISATION

Dessiné pour le tir de combat, le P 220 semble au premier abord un peu épais. En fait, la prise en main s’avère très bonne et même remarquable pour le tir rapide non visé. A la cible, l’arme apparaît toutefois un peu haute sur la main, mais la visée large et nette – cran de mire et guidon de 3 mm – facilite bien les choses. Le chargeur est aisément garni de ses neuf cartouches.

En double action, le départ est ferme, mais peut être considéré comme correct pour un automatique. Par contre, la simple action est excellente, très douce, mais nantie d’une course un peu longue. La sur-course, après décrochement du chien, est importante bien que peu gênante. L’arme a été essayée sur appui à 25 mètres, avec le concours de deux tireurs très entraînés. Il y eut un incident de tir, le percuteur n’ayant pas touché l’amorçage pour une cause que nous n’avons pu déterminer. Trois types de munitions ont été utilisés et, à titre indicatif, nous donnons les écarts centre à centre des deux impacts les plus écartés par groupe de 10 balles.

Italienne : Frocchi                 88 mm

Allemande : Geco                  97 mm

Française : Gévelot              114 mm

Avec sa grosse poignée, son pontet conformé pour le tir à deux mains et sa détente à double effet, le P 220 est avant tout une arme conçue pour la défense. Pour la cible, il lui manque une visée réglable et un départ plus fin, mais il reste bien adapté à la discipline de compétition dite de tir de combat.

Caractéristiques :

Calibre : 9 mm (se fait aussi en 7,65 et 45 auto, 38 super auto et 22 LR avec conversion)

Capacité du chargeur : 9 coups

Longueur totale : 198 mm

Longueur du canon : 112 mm

Poids à vide : 820 g.

Carcasse : alliage léger

Instrument de visée : réglage en hauteur et dérive

 Renaud de la Taille

 

 

Acropole de Cefalù – Grèce

Sentinelle tournée vers le large, le rocher pelé de l’acropole de Cefalù se dresse, isolé, sur la côte nord de la Sicile, telle une immense vague de calcaire brûlée par le soleil qui se détache au-dessus des flots verdâtres de la mer Tyrrhénienne. Blottie à ses pieds, une petite cité médiévale aux ruelles tortueuses, ancrée au rocher, confondue dans la même patine couleur du temps, comme une muraille irrégulière dans laquelle on aurait percé quelques ouvertures.

Le site, véritable belvédère marin, fut occupé et fortifié dès 396 av. J.-C. par les Grecs qui en firent une acropole, avant de devenir une forteresse byzantine pour surveiller et sécuriser les routes maritimes. Occupé par les Sarrasins dès le 9e siècle, ce nid d’aigle fut alors transformé en un redoutable repaire de pirates et de brigands. Durant plusieurs siècles, il servit d’ancrage et de point d’appui aux flottes mauresques qui écumaient les rivages de la Méditerranée, semant le feu et le sang jusqu’aux côtes de la Provence, n’hésitant pas à pénétrer très loin dans les Alpes pour piller (l’Abbaye de St. Maurice fut  réduite en cendres en 840 et ils ne furent rejetés du col Grand-Saint-Bernard qu’en 972 !). Les Normands les chasseront de Sicile au 11e siècle, avant de laisser place aux Espagnols au 15e siècle…

Coupée de toute part par des falaises abruptes, l’acropole de Cefalù constitue, de fait, l’un des plus formidable nid-d’aigle de la Méditerranée, une forteresse naturelle quasi inexpugnable, et on comprend que les différents envahisseurs l’aient fortifiée tour à tour. Pour accéder au vaste plateau fortifié sommital, une seule possibilité : une étroite faille naturelle que le sentier gravit en lacets, barrée à diverses hauteurs par de solides murs défensifs qui  s’appuient au rocher et que l’assaillant devait contourner par un cheminement en chicane, en s’exposant constamment aux tirs fichant venant des hauteurs. De quoi dissuader n’importe quel attaquant, à moins d’être totalement fou pour tenter l’aventure ! Sur le plateau, quelques vestiges de fortifications antiques et une enceinte médiévale rappellent ces temps troublés…

Si vous passez par Cefalù, n’hésitez pas à monter à l’acopole : la grimpée est rude, mais la vue sur la mer et les toits rouges de la cité est vraiment superbe…

Les parabellum de l’armée suisse

Peu d’armes ont eu, dans leur version militaire, une vie aussi longue que le pistolet parabellum d’ordonnance suisse. Comme arme d’officier, son temps de service a commencé avec l’adoption du « modèle 1900 » et s’acheva vers 1980, lorsque les derniers officiers qui ont reçu le « modèle 1929 » ont été libérés de leurs obligations militaires.

Actuellement le parabellum suisse est devenu un objet de collec­tion très prisé.

A la fin du XIXe siècle, les inventeurs ont cherché à remédier aux nombreux in­convénients des revolvers et ont été amenés à abandonner le système du ba­rillet pour rechercher la solution du pro­blème dans un pistolet à répétition. Ces inventeurs eurent l’idée de rendre auto­matique le fonctionnement de l’arme en empruntant au recul la force motrice né­cessaire : le pistolet automatique était né.

Commission et cahier des charges

En 1896, une commission, en Suisse, fut nommée pour l’étude des pis­tolets automatiques alors connus. Elle était composée de MM. le Colonel von Orelli. chef de la section technique de l’administration du matériel de guerre fé­déral, le colonel von Mechel, le profes­seur Dr Amsler-Laffon, le major von Stürler, directeur de la Fabrique fédérale d’ar­mes, le colonel Rubin, directeur de la fa­brique de munition, Schenker, chef du contrôle fédéral de la munition et le capi­taine Korrodi, adjoint de la section techni­que. Elle procéda, en juin 1897, à Thoune, à des essais de tir avec quatre systèmes différents de pistolets soit : Mauser, Borchardt, Bergmann et Männlicher, les trois premiers présentés par des maisons allemandes, le dernier par son inventeur de Vienne. En octobre, un rap­port très complet est rédigé par le colonel von Mechel et le professeur Dr Amsler. Ce rapport fait ressortir les avantages et les inconvénients des divers systèmes. Tenant compte des observations faites à leurs divers systèmes, les inventeurs cherchèrent à perfectionner leur arme, les uns se bornèrent à des modifications de détails, d’autres établirent des types en­tièrement nouveaux. Les travaux ayant duré près d’une année, les représentants des diverses fabriques furent invités à se présenter le 23 novembre 1898 à Thoune, pour y exposer, devant la commission, les transformations et perfectionnements ap­portés à leurs armes et pour procéder à de nouveaux essais.

Pour compléter cette commission, le Département militaire fédéral désigna :

  1. le Colonel Wilbolt. comme représen­tant la cavalerie, le lieutenant-colonel Chauvet comme représentant l’artillerie, le lieutenant-colonel Brunner, comme re­présentant l’état-major général et le major de Meuron, comme représentant de l’in­fanterie. Six armes étaient en présence : Mauser, fabriqué par la maison Mauser à Oberdorf, Wurtemberg et présenté par M. Paul Mauser, ingénieur ; Bergmann, fabriqué à Suhl et présenté par le colonel Gressly ; Borchardt-Lüger, fabriqué par la « Fabrique allemande d’armes et muni­tions » à Berlin, présenté par M. Lüger, in­génieur ; Mannlicher, premier modèle fa­briqué par la « Société Industrielle Suisse » (SIG) à Neuhausen et présenté par M. Frey, directeur de « SIG » ; deuxième modèle fabriqué et présenté par l’inventeur M. Manniicher de Vienne ; Roth, fabriqué par la maison G. Roth à Vienne et présenté par M. Roth, fils.

Le programme des essais était le suivant :

  1. Description des pistolets, démontage et remontage par les inventeurs ou leurs représentants.
  2. Feu de vitesse, pour chaque modèle, deux séries de 50 coups chacune, tirées par les inventeurs.
  3. Essais de précision, trois séries de 30 coups chacune, tirées à 50 mètres avec l’arme appuyée par un employé du contrôle des armes.
  4. Essais de 400 coups avec la même arme sans la nettoyer, ni la rafraîchir, tirés en partie par les inventeurs, en partie par les membres de la commission.
  5. Essais du fonctionnement de l’arme avec charge de poudre augmentée ou di­minuée, avec les parties de la culasse en­tièrement sèche (non graissées) et grais­sées ensuite avec de l’huile rance et dur­cie.
  6. Essais de poussière et d’eau, 50 à 100 coups à tirer, l’arme ayant été préalablement saupoudrée de poussière de route et ensuite arrosée d’eau.
  7. Essais de pénétration, trois coups à 10 mètres contre une série de plaques de tôle de fer de 0,8 mm d’épaisseur.
  8. Mesure de vitesse initiale, 5 coups par arme.

Les essais et la concurrence

Les essais durèrent trois jours. Après l’exécution de l’un des points du programme avec l’un des systèmes, les membres de la Commission faisaient part de leurs observations personnelles qui étaient discutées et cas échéant, consignées au procès verbal. Pour établir d’une manière aussi exacte que possible la comparaison entre les résultats obtenus par les armes essayées, il était attribué pour chaque arme, une note de 1 à 4 pour les différents points suivants :

  1. Avantages ou désavantages du principe même de construction de l’arme.
  2. Solidité.
  3. Formes de l’arme, en tenant compte :
  4. a) de la facilité de la porter.
  5. b) de la manière dont elle se tient dans la main.
  6. Fermeture contre la poussière et l’hu­midité.
  7. Fonctionnement de l’arme :

a)dans des conditions normales,

  1. b) l’arme non graissée,
  2. c) l’arme graissée avec de l’huile rance,
  3. d) l’arme saupoudrée de poussière et ar­rosée d’eau,
  4. e) avec des cartouches à charge réduite.
  5. Avantages et désavantages :
  6. a) de la charge du magasin,
  7. b) de la charge coup par coup,
  8. c) du déchargement.
  9. Position de la culasse (ouverte ou fer­mée) lorsque le magasin est vide.
  10. Armement automatique du chien.
  11. Système de sûreté.
  12. Vitesse du tir.
  13. a) Facilité de viser et qualité de la détente.
  14. b) Précision.
  15. c) Recul.
  16. Pénétration.
  17. Démontage et remontage de l’arme.
  18. Nettoyage de l’arme.
  19. Système de chargeur.

Ce fut le pistolet Borchardt-Lüger qui obtint le plus grand nombre de points et sortit premier avec une avance considéra­ble sur ses concurrents classés dans l’or­dre suivant : 2. Roth ; 3. Mannlicher ; 4. Bergmann ; 6. Mauser.

Le pistolet Roth a été éliminé car le tireur doit armer le chien avant chaque coup. Après l’étude minutieuse des divers types de pistolets présentés, la commis­sion prit les décisions suivantes :

  1. L’arme doit être entièrement automati­que.
  2. Le poids de l’arme ne doit pas dépas­ser 1 000 g.
  3. Le calibre doit être de 7,5 à 7,65 mm.
  4. La longueur ne doit pas dépasser 275 mm.
  5. Le poids de la balle doit être au mini­mum de 5,5 g.
  6. Le nombre de cartouches du magasin doit être de 8 à 10.
  7. Le recul doit être aussi restreint que possible.

Après constatation des résultats ob­tenus par les divers systèmes, il fut dé­cidé :

  1. Des essais seront continués en premier lieu avec le Borchardt-Lüger, en second lieu avec le Mannlicher.
  2. Les autres systèmes sont éliminés, les raisons de leur élimination seront commu­niquées aux inventeurs.
  3. M. le professeur Amsler et la Fabrique fédérale d’armes sont chargés d’étudier d’une manière plus détaillée, spéciale­ment au point de vue de leur construction, les deux armes qui restent en présence.
  4. La section technique fera procéder. par ses divers organes, à des essais rela­tifs à la précision, à la vitesse initiale, à la pénétration, etc.
  5. La commission sera convoquée à nou­veau pour prendre connaissance de l’étude et des essais.

Les deux derniers en lice

Le 1er mai 1899, la commission se réunissait à Thoune pour procéder aux essais avec les deux pistolets restant en lice. Depuis la dernière réunion deux offres nouvelles étaient parvenues, l’une de Hauff à Berlin, l’autre de la Fabrique nationale d’armes de Herstal, Belgique (système Browning). Ces deux offres ne sont pas prises en considération, la pre­mière de ces armes étant encore dans une période d’étude, la culasse de la se­conde n’étant pas accouplée au canon. La commission décide de procéder avec les deux pistolets aux mêmes essais avec les modifications et adjonctions suivan­tes :

Essais de durée, 500 coups au lieu de 400, tir avec des douilles entaillées, essais de pénétration dans des planches de hêtre et sapin.

Après ces essais, la commission constate :

Pistolet Borchardt-Lüger : après 500 coups, l’arme fonctionne comme au début, la précision n’a pas changé, l’en­crassement très restreint, presque nul ; deux fois la culasse n’a pas été repous­sée en avant, aucune observation sur la munition.

Pistolet Mannlicher : d’abord deux arrêts dans la charge par suite de deux cartouches ayant chevauché l’une sur l’autre, après 175 coups, le pistolet ne fonctionne plus, il doit être démonté, de nouveau deux douilles ne sont pas extrai­tes ; extraction très irrégulière, très fort en­crassement, le pistolet n’est pas bien en main.

Afin de procéder à de nouveaux essais sur une plus grande échelle, la commission décida la commande de 20 pistolets Borchardt-Lüger et une cer­taine quantité de cartouches. En outre, un certain nombre de « desiderata » furent indiqués à l’inventeur.

Les vingt pistolets commandés fu­rent livrés, ainsi que la munition, en octo­bre et novembre 1899 par la « Fabrique allemande d’armes et de munitions » à Berlin. Les modifications réclamées par la commission et spécialement celle concer­nant l’adjonction d’une sûreté dite mécanique avaient été conçues et exécutées, par les fabricants, d’une manière à la fois simple, solide et pratique. Ces armes fu­rent mises en essai de novembre 1899 à mars 1900, dans des cours de répétitions militaires et sociétés de tir, soit : les socié­tés suivantes ont eu l’occasion de tester ces pistolets : Société de tir au revolver, Berne, Société militaire de Bâle, Société de cavalerie de Bâle, Société de tir au re­volver de Lausanne.

Tous les rapports faits, à la suite de ces essais, s’expriment d’une manière très favorable. A Lausanne, au stand de tir de la Pontaise, sont invités les repré­sentants des sociétés de tir de la ville et des officiers des troupes montées. Devant ce public choisi, quatre des meilleurs ti­reurs à l’arme de poing exécutent trois exercices à 50 mètres, dont l’un est un tir de vitesse. Les résultats sont remarqua­bles au double point de vue du fonction­nement et de sa précision. Cette séance fut suivie d’une passionnante discussion. La conclusion unanime montre que le nouveau pistolet possède toutes les quali­tés d’une bonne arme de guerre et d’une remarquable arme de stand.

Les 2 et 3 avril 1900, la commission se rassemblait une dernière fois à Berne pour liquider quelques détails de cons­truction pour procéder à certains essais spéciaux et pour formuler ses proposi­tions définitives : l’arme doit être réglée pour une distance de but en blanc de 50 mètres ; à cette distance le point tou­ché doit se trouver à 20 cm, plus haut que le point visé de manière à permettre le tir sur visuel noir de 40 centimètres de dia­mètre. Le guidon devra être relevé de 0,4 mm. La forme de la détente sera amé­liorée suivant les indications de la Fabri­que fédérale d’armes de Berne. La commission unanime décide de proposer au Département militaire fédéral, « L’adoption du pistolet automatique Bor­chardt-Lüger, calibre 7,65 mm. en lieu et place du revolver, avec une dotation de 48 cartouches par arme.

Acceptation et premières commandes

Le 4 mai 1900. le Conseil fédéral dé­cide de l’accepter comme arme de poing de l’armée suisse. Une première commande de 5 000 pièces est exécutée comme suit par la « Deutsche Waffen und Munitionsfabrik à Berlin » : 2 000 pistolets livrés directement à l’Administration fédé­rale ; 1 500 exemplaires fournis à la Fa­brique fédérale d’armes, Berne ; 1 500 exemplaires expédiés en pièces déta­chées et assemblés à la Fabrique fédé­rale d’armes (Waffenfabrik).

La Suisse fut ainsi le premier pays qui choisit le Parabellum comme arme d’ordonnance. Grâce à la référence de la commande de la Suisse, la « Deutsche Waffen und Munitionsfabrik » put mettre en train la fabrication de série et fournir peu à peu le monde entier. A son tour, l’Allemagne reconnut la valeur de « son » Parabellum et l’introduisit dans la marine en 1904 et en 1908 dans l’armée.

D.W.M. ou Deutsche Waffen Und Munitionsfabrik, Berlin, fut constituée lors­que Ludwig Löwe. un fabricant berlinois d’armes à feu et de machines-outils, acheta la Deutsche Metallpatronenfabrik de Karlsruhe. cette association agissant par la suite avec la nouvelle raison so­ciale. En 1922, elle fût contrôlée par une société financière et fut appelée « Berlin-Karlsruhe Industriewerke » (BKIW), mais en 1936 elle reprit le nom DWM soit Deutsche Waffen und Munitionsfabrik.

WF + Waffenfabrik Berne (Fabrique fédérale d’armes) fut crée en novembre 1871. Au début la WF + effectuait du montage d’armes. Son premier directeur, le lieutenant-colonel Rudolf Schmidt fonctionna de 1871 à 1894; c’était l’ancien contrôleur fédéral d’armes. Louis von Stürler a été directeur de 1894 à 1920, il a été remplacé par AdoIf Furrer 1920-40.

Les variantes de 1900 à 1929

Marquages : La genouillère porte le monogramme « D.W.M. » entrelacé ; sur le tonnerre « croix fédérale rayonnée », sous le canon le numéro de série, devant, en haut de la sous-garde, les deux der­niers chiffres sont répétés sur différentes parties de l’arme, il en est de même pour le poinçon du contrôleur d’armes et de la petite croix fédérale.

Les boutons de la genouillère sont chanfreinés et le bouton de droite porte un cliquet de blocage qui s’engage dans un cran fraisé dans la carcasse pour as­surer le retour en position fermée de la culasse. Ce dispositif s’est révélé superflu et a été abandonné sur les autres modè­les.

Le magasin a un bouton guide qui a nécessité un fraisage dans la poignée. Par la suite, le bouton-guide est plat et ne nécessite pas de fraisage. Le ressort ré­cupérateur logé dans la poignée, est un ressort à lame, sur les modèles ultérieu­res ils ont un ressort à boudin. Bien que le modèle 1900 eut été soumis à des essais sérieux avant son adoption, il subit encore des modifications en cours de production. Les armes civiles, pour tes services de police, le tir, etc., portent l’ancien poin­çons du banc d’épreuve allemand « BUG ».

Ces modifications sont : ailette du le­vier de sûreté étroite jusqu’au numéro 2 000, puis dès n° 2 001, large. La dé­tente est étroite jusqu’au n° 3 900, large de 3 901 à 5 000. puis étroite. Le levier d’arrêt long de 14 mm, quadrillé de 750 à 2 000. haut et long de 10 mm. haut, long de 8 mm, cannelé dès 2 001. Le recul du canon jusqu’au moment où la culasse mobile se sépare et de 5 mm, le recul total du canon jusqu’à l’ouverture complète de la culasse est de 10 mm.

Dispositif de sûreté : il faut faire une distinction entre la fonction du levier de sûreté sur le dos de la poignée et celle du levier d’arrêt sous le coursier de gauche. Le levier de sûreté bloque l’appareil de percussion, tandis que le levier d’arrêt ne bloque que le levier de sûreté quand celui-ci est assuré. Le levier de sûreté est maintenu en arrière par le ressort situé près de son pivot. La languette appuie contre la partie postérieure de la gâchette et empêche l’appareil de percussion de fonctionner, comme la partie mobile de reculer. Quand on met le levier d’arrêt sur « S », sa griffe se place devant le contre­fort triangulaire du levier de sûreté, blo­que ce dernier et empêche qu’il puisse être désassuré.

Malgré des essais très approfondis, le pistolet subit au cours des ans des mo­difications de détails.

Modèle 1900 : extracteur forme res­sort, encoche de mire triangulaire, cylin­dre de fermeture plat et plus bas que les bords supérieurs de la boîte de culasse, boutons de genouillères fraisés, la ge­nouillère postérieure porte les trois der­niers chiffres du n° de l’arme derrière la pièce jaune molletée, percuteur à cône très accentué, guide de 7 mm, ressort ré­cupérateur à lame, arrêtoir de magasin à tête striée. La carcasse porte le crochet de fermeture de la genouillère sur la droite, porte une bride pour fixer une courroie, levier de sûreté (poignée) ailette de 30 mm de longueur, poinçons D.W.M. et croix fédérale flammée sur le tonnerre du canon, plaques de poignées en noyer strié jusqu’au bord, magasin pièce de fond en bois avec rondelle métallique, le levier d’arrêt se déplace entre deux dé­pressions.

Modèle 1906 première série : Extrac­teur rigide, rappelé par un ressort à bou­din, lorsqu’une cartouche est dans le canon, l’extracteur reste dans une posi­tion plus élevée ce qui permet de lire sur son flan gauche « geladen », cylindre lé­gèrement bombé et à la même hauteur que les bords de la culasse, boutons de la genouillère plats et striés. Percuteur à cône peu élevé, ressort récupérateur à boudin, carcasse sans crochet de ferme­ture, magasin fond bois sans rondelle. Sur le tonnerre du canon : Croix fédérale flammée.

1906 deuxième série: Sur le ton­nerre du canon : Croix fédérale dans un écusson.

Modèle 1917-24: Armes fabriquées par la Fabrique fédérale d’armes de Berne. Marquages : Waffenbabrik sans la croix fédérale, plaquettes en noyer ou en bakélite.

Modèle 1929 : La poignée est plus droite, les plaquettes de crosse sont en matière plastique, l’ailette de sûreté est plus longue et dont les deux côtés pénè­trent dans la poignée, la genouillère anté­rieure porte un écusson avec la Croix fé­dérale, l’encoche de mire a la forme d’un U, boutons de genouillères lisses, la nu­mérotation est entière sur la partie supé­rieure, verrou noir, non molleté, arrêtoir de magasin lisse, la longueur de l’ailette de sûreté est de 46 mm, magasin pièce de fond en matière synthétique, arme fa­briquée par la Waffenfabrik, pistolet fabri­qué jusqu’en 1947-48, numérotation de 60011 à 77 941.

La W+F a fabriqué des Parabellum M.29 pour la clientèle civile constituant deux petites séries de 25 001 à 26 600 et de 77 942 à 78 258 ; les numéros sont précédés de la lettre P. En 1949, aux « Championnats du monde » à Buenos Aires, au tir à 50 mètres à l’arme de gros calibre (pistolet et revolver), une nette vic­toire fut remportée par l’équipe suisse de 7 tireurs armés du pistolet M. 1929 de la fabrique fédérale d’armes. L’arme corres­pondait au modèle d’ordonnance mais avait été pourvue d’un canon allongé pour accroître la précision. Le pistolet pesait 1 010 grammes, la longueur totale était de 318 mm, le canon long de 200 mm nu­mérotation de 1 à 20.

Fonctionnement du Parabellum

 Au départ du coup, les gaz, agissant sur le culot de la douille, repoussent en arrière le canon et la boîte de culasse qui coulissent le long des rainures de la car­casse. Pendant ce mouvement, d’une amplitude de 5 mm, la culasse mobile et le canon sont solidaires. La culasse mo­bile suit le mouvement, la genouillère s’élève jusqu’au moment où le double ressort contenu dans la crosse, se trouve entièrement comprimé de même que le ressort de percussion. La douille, entraî­née par l’extracteur, vient buter contre l’éjecteur qui l’expulse. Le logement de la culasse mobile étant dégagé, la cartou­che supérieure du magasin, poussée par le ressort intérieur, vient se placer devant la tête du cylindre. Le double ressort, comprimé par le recul, repousse la culasse mobile en avant par l’intermé­diaire de la chaînette qui relie ces deux pièces. La genouillère s’abaisse à moitié, tout en communiquant son mouvement à la boîte de culasse et au canon. Le percu­teur bute contre un arrêt saillant sur la paroi intérieure de gauche de la boîte de culasse, le ressort de percussion reste comprimé. La genouillère entièrement ra­battue, le canon et la culasse mobile sont solidement reliés. En pesant sur la dé­tente, le percuteur devenu libre se porte en avant et frappe la cartouche. Après la dernière cartouche tirée, le bouton du ma­gasin pousse un ressort qui vient faire saillie dans la carcasse et s’engage dans l’entaille du cylindre. La ligne de mire étant masquée, le tireur est avisé que l’arme est vide. Après l’introduction d’un nouveau magasin, il suffit de retirer un peu en arrière la culasse et de la laisser revenir en avant, l’arme est prête pour le tir.

Le démontage : Il se fait dans l’ordre suivant : retirer les cartouches, prendre le pistolet désassuré dans la main droite, le pouce pèse sur le levier de sûreté, les autres doigts tirent les boutons de ge­nouillère directement en arrière jusqu’aux coursiers incurvés. De la main gauche, abaisser le bouton du verrou et enlever la plaque de recouvrement. Faire glisser la partie mobile en avant et l’enlever. Sortir la goupille de culasse de son logement en la poussant vers la gauche tirer la culasse en arrière et l’enlever.

Pour démonter l’appareil de percus­sion, presser fortement la broche d’arrêt avec un tournevis, lui faire faire un quart de tour vers la gauche, de sorte que le tenon soit libéré, l’enlever en cédant à la pression du ressort. Extraire du bloc obtu­rateur (cylindre) le ressort de percussion et le percuteur. Pour enlever la gâchette, il faut soulever le ressort de gâchette avec un tournevis mince et t’extraire en le faisant glisser ; la gâchette peut alors être enlevée. Enlever l’éjecteur : soulever la partie postérieure avec un tournevis jus­qu’au moment où le talon de l’éjecteur sort de son logement, enlever l’éjecteur en poussant son bec vers l’extérieur de la boîte de culasse. Enlever les deux pla­ques de poignée, poser la poignée à plat, côté gauche dessus, tenir le levier de sû­reté en pressant sur l’ailette, soulever le pivot et retirer le levier de sûreté. Pour en­lever l’arrêtoir de culasse, le soulever un peu et l’enlever en le tirant en arrière. Pour enlever la détente, la tirer au dehors suivant t’axe du pivot. On ne doit pas sé­parer la détente de son ressort. Enlever le verrou en position ouverte, pousser le le­vier vers le haut et tirer le verrou dehors.

Le remontage se fait en inversant le démontage.

Les incidents de tir

Le coup ne part pas :

  1. En prenant la poignée, le tireur n’a pas suffisamment pesé sur le levier de sûreté qui bloque en­core la gâchette,
  2. Un corps étranger s’est introduit entre la poignée et le levier de sûreté,
  3. Le levier coudé de détente est faussé, dans ce cas, le faire rempla­cer.

Le premier coup est parti, le second ne part pas : le ressort de détente est trop faible pour pousser la détente suffisam­ment en avant, de sorte que la goupille d’échappement n’a pas pu glisser sous le levier coudé de détente.

Le pistolet mitraille : le cran de rete­nue de la gâchette ou le tenon d’arrêt du percuteur est usé ou émoussé, le ressort de gâchette lâche, courbé ou usé.

La douille n’a pas été éjectée : elle est restée dans la chambre à cartouche où elle est coincée entre la culasse et la chambre à cartouche : le recul est insuffi­sant parce que le tireur ne tient pas son arme assez fermement, (il arrive aussi que le tireur accompagne de la main le mouvement de recul) il se peut alors que la force du recul soit en partie neutralisée et ne suffise plus à ouvrir complètement la culasse.

La culasse se ferme sans introduire une nouvelle cartouche dans la chambre à cartouche : le magasin est mal fixé, (dans la plupart des cas, il tombe au dé­part du coup) ; le magasin est encrassé ou faussé de sorte que l’alimentation en cartouches fonctionne mal.

La douille reste dans la chambre à cartouche après le départ du coup, la car­touche suivante est coincée contre la douille et la culasse :

  1. La griffe de l’ex­tracteur est usée ou cassée,
  2. b) La douille est coincée, la chambre à cartouche étant encrassée.

La culasse se ferme quand le maga­sin est vide :

  1. Le magasin est faussé ou encrassé ce qui empêche le bouton du guide de l’élévateur des cartouches de soulever l’arrêtoir de culasse,
  2. b) Le cran de retenue de l’arrêtoir ou du cylindre est usé.

Ratés : on entend fonctionner l’appa­reil de percussion, la cartouche n’a pas été percutée : la pointe du percuteur est brisée.

La cartouche n’a été que légère­ment frappée par le percuteur :

  1. La pointe du percuteur est usée, le ressort de percussion est lâche ou brisé,
  2. b) Il y a trop de graisse dans l’orifice de percus­sion et dans le logement du percuteur ce qui ralentit le mouvement. Ce dérange­ment se produit surtout par temps froid.

En 1960, une maison américaine de­manda à la W + F les conditions d’une reprise de la fabrication du Parabellum. La fabrique d’armes modifia, à cette occa­sion, la construction du M. 1919 et établit de nouveaux plans pour une rationalisa­tion plus poussée. La fabrication en Suisse se révéla trop onéreuse et la mai­son américaine renonça et prit contact avec la Firme Mauser. Cette dernière re­prit de la W + F la documentation techni­que. les gabarits, les jauges. La fabrica­tion débuta en 1968.

Caractéristiques techniques :

 Désignation de l’arme : Pistolet Borchardt-Lüger Parabellum.

Modèle : Suisse 1900.

Constructeurs-fabricants : MM. les Ingé­nieurs Borchardt et Lüger de la Fabrique d’armes et munitions à Berlin.

Principes de fonctionnement : Culasse à genouillère, chargée par le recul de la culasse.

Nombre d’armes fabriquées : Pistolets d’ordonnance : 5 100.

Années de fabrication : 1900 à 1905.

Longueur totale : 237 mm.

Hauteur hors toute : 140 mm.

Longueur du canon : 120 mm, vissé dans la boîte de culasse. Longueur jus­qu’au culot de la douille, 122 mm.

Epaisseur : 39 mm.

Poids de l’arme : Sans le magasin :

835 grammes, poids du magasin vide :

57 grammes.

Forme du canon : Rond et tronconique.

Calibre : 7,65 mm.

Nombre de rayures : 4 rayures concentri­ques de 3,1 mm de largeur, 0,125 mm de profondeur aux angles légèrement arron­dis.

Direction des rayures : Rayures tournan­tes à droite, constantes.

Pas : 1 tour sur 250 mm.

Longueur de la ligne de mire : 214 mm.

Hausse : Placée sur l’articulation posté­rieure de la culasse, réglée pour une dis­tance de but en blanc de 50 m, encoche de mire triangulaire.

Guidon : Triangulaire, arrondi en avant, sur queue d’aronde sur bloc soudé sur le canon, haut de 10 mm.

Carcasse : En acier, comprenant la poi­gnée, les appareils de détente, de ferme­ture et de sûreté.

Poignée : Avec deux plaquettes en noyer, quadrillées jusqu’au bord, elles sont arrondies, fixée au bas par une vis métallique.

Sous-garde : Ronde faisant bloc avec la carcasse et la poignée, à sa hauteur sur la poignée, bouton molleté d’arrêt du magasin.

Détente : Lisse, incurvée.

Alimentation : Par magasin amovible dans la poignée pour 8 cartouches.

Sûreté : Face gauche arrière de la boîte de culasse, levier de sûreté, sur la poi­gnée, pédale de sûreté. Protection extérieure : Bronzé bleu noir.

 F. Pellaton 1990

 

 

Poinçons utilisés par les pistolets Parabellum, armée suisse
  1. Poinçon de contrôle des armes d’ordonnance.
  2. Poinçon du contrôleur fédéral d’armes.
  3. Poinçon du banc d’épreuve allemand pour les armes civiles.
  4. Idem comme N° 3
  5. Idem comme N° 3 & 4
  6. Poinçon du contrôleur fédéral d’armes
  7. Poinçon de résistance (cartouche à double charge)
  8. Poinçon du contrôleur fédéral d’armes
  9. Idem, comme 2 & 8
  10. Poinçon du banc d’épreuve allemand dès 1920
  11. Poinçon du banc d’épreuve allemand dès 1930, arme civile
  12. Poinçon du banc d’épreuve allemand dès 1940
  13. Poinçon du banc d’épreuve allemand
  14. Poinçon du contrôle fédéral des armes
  15. Poinçon de la Waffenfabrik (Fabrique fédérale d’armes)
  16. Marquage privé Flückiger, armurier, Zürich
  17. Poinçon de libération de l’arme militaire, remise au privé
  18. Poinçon de la Waffenfabrik de Berne pour arme de remplacement
  19. Poinçon de contrôle final de SIG, à Neuhausen
  20. Poinçon de contrôle du matériel (chrome-nickel « acier »)

Le pistolet SIG P 210 de l’armée suisse

SIG pour Schweizerische Industrie Gesellschaft : en français, société Industrielle Suisse, à Neuhausen, près des chutes du Rhin à la frontière nord-est de la Suisse. Une énorme société, fondée en 1853 dont l’activité principale reste le matériel ferroviaire. Mais dès 1860, la SIG se mettait à la fabrication des armes, surtout militaire et elle reste aujourd’hui le principal fournisseur de l’armée suisse.

En 1937, la société acquiert le droit d’exploiter les brevets pris par Charles Petter, de la société Alsacienne de Constructions Mécaniques pour la fabrication d’un pistolet automatique. Charles Petter était le créateur de l’ancien pistolet réglementaire français  de 7,65 mm long, le modèle 1935 A. Les premières armes sorties de Neuhausen avant la guerre, en 7,65 et 9 Para, ressemblent donc au 1935 A. en 1942, la version est modifiée et aboutit au SP 44, avec chargeur de 16 cartouches en quinconce, cal. 9 mm P.

Ce modèle échoue aux tests militaires et, sensiblement remanié, devient le SP 47/8 ; SP pour Selbstlade Pistole (pistolet automatique), 47 pour 1947, année de sa fabrication et 8 pour les huit cartouches du chargeur. Offert sur le marché commercial en 1947, adopté par les armées suisse et danoise en 1948 avec le matricule M 49, il est actuellement connu sous le nom de P 210. Selon la finition, la longueur du canon, ou le type de hausse, il s’appelle P 210-1, 1, 5 et 6.

Conception générale

Dans son principe, le SIG relève du système Browning, dont le prototype reste le Colt 45 de l’armée US : culasse calée, déverrouillage par abaissement du canon, culasse enveloppante, détente à simple action. Mais le SIG s’en distingue par trois points : le guidage de la culasse, la came de verrouillage et la platine démontable.

Avec le dessin habituel, c’est la culasse qui enveloppe la carcasse et, pour en permettre le recul, les rainures de guidage ne courent que sur la moitié environ de la longueur utile. De ce fait, l’ensemble culasse-canon a presque toujours un jeu vertical sensible par rapport à la carcasse. Dans le SIG, c’est la carcasse qui enveloppe la culasse, et les rainures de guidage courent sur toute la longueur. Tout jeu vertical ou latéral est donc impossible. Le basculement du canon, ensuite, était assuré par une biellette dans le Colt ; inconvénient : le canon commence à descendre quand la balle est encore dans le canon.. Browning rectifiera le système dans le Herstal avec une came mâle sous le canon engageant une came femelle taillée dans la carcasse. Et, avec le SIG, le système est poussé à son ultime simplification, ce qui, en mécanique, rime avec perfection. L’axe de l’arrêtoir de culasse traverse une découpe oblique alésée dans le renfort inférieur du canon, et qui sert de came pour assurer le basculement. A noter que celui-ci ne commence qu’après 3 mm de course arrière, l’axe de tir restant fixe tant que la balle est dans le canon.

Ensuite, chien, gâchette, ressorts et autres sont montés dans une platine amovible, selon le procédé Petter du modèle 1935 A, qu’on retrouve aussi dans leTokarev TT33. Cette platine a toutefois été améliorée, et la gâchette est munie d’un ressort indépendant du ressort de chien.

Matériaux et exécution

Le SIG est construit dans la plus fine tradition de l’horlogerie suisse : du triple point de vue qualité des aciers, précision des ajustages et tolérances de l’usinage, c’est de fort loin le meilleur de tous les pistolets de combat existants. Pas d’alliages légers, de tôles pliées ou de pièces frittées : de l’acier forgé taillé dans la masse aux côtes les plus sévères : toutes pièces interchangeables, strictement. Parmi les dizaines d’armes examinées par nos soins, les canons de SIG sont les seuls qui, mesurés avec un pied à coulisse au 1/50 mm, soient rigoureusement identiques.

Une fois verrouillé dans la culasse, le canon n’a aucun jeu perceptible ; de même pour la culasse installée dans la carcasse. Le démontage sommaire st simple et facile.

Fonctionnement

L’arrêtoir, très dur, gratte beaucoup sur le chargeur, mais celui-ci se garnit aisément de ses 8 cartouches. La main a peu de prise sur la culasse, du fait de son montage, et il faut une bonne poigne pour le manœuvrer aisément. La détente est relativement douce, avec un départ en deux temps bien séparés. Sur le modèle de notre essai les instruments de visée sont fixes : cran de mire en U, guidon à section rectangulaire. Pas de réglage possible en hauteur, mais la SIG vend un outil permettant de déplacer latéralement le guidon pour le réglage horizontal.

Ces instruments de visée, sont bien dessinés et forts nets. Comme de coutume, le pistolet a été testé sur appui, à 25 m, par un tireur très entraîné au maniement des gros calibres. Quatre types de munitions 9 mm ont été essayés : standard suisse (fabrique de Thun), standard belge (FN), standard français (SF-1) et enfin 9 mm française de match, dite F1, avec balle à épaulement (arsenal de Toulouse).

Les écarts, centre à centre, entre les deux impacts les plus distants par groupe de 10 balles ont été les suivants :

 

Thun : 51 mm

FN :  78 mm

Sf-1:  97 mm

Disposant de peu de cartouches F 1, les groupements, faits sur 5 balles, ont donné en moyenne 37 mm, ce qui est remarquable pour une arme militaire. Il n’y eut aucun incident de tir ; le SIG est d’ailleurs renommé pour sa fiabilité. Un seul point noir :  en tant qu’arme de service, le P 210 est en principe remplacé par le SIG-Sauer P 220 à double action. Mais on le trouve encore dans le circuit commercial. Le jour où il n’y sera plus, disparaîtra le dernier pistolet impeccablement fabriqué.

 

Fiche technique SIG P 210

Calibre :  7,65 mm ou 9 mm Parabellum ou 22 LR

Longueurs : P 210-1, 2 et 6 : 215 mm ; P 210-5 : 245 mm

Poids avec chargeur vide :

-P210-2 : 995 g

-P210-5 : 1045 g

-P210-6 : 1030 g

Capacité du chargeur:  8 coups

 

 

LE FUSIL VETTERLI

Le Vetterli – ou plutôt la famille des Vetterli – présente des particularités qui constituent un « cas » unique  dans l’histoire de l’armement. Jugez plutôt :

C’est la première arme à répétition adoptée dans une armée européenne. C’est aussi l’arme qui a été « suivie », tout au long de sa carrière, par son créateur avec une vigilance qui s’est traduite par de très nombreuses modifications. Enfin, c’est une « famille » nombreuse puisqu’elle compte, le long de ses vingt ans d’existence, quinze types différents… ceci, sans doute, pour combler les collectionneurs du siècle suivant !

Dans le langage militaire suisse, les Vetterli caractérisent une époque : « le temps du Vetterli ». Voici son histoire…

Dans son rapport à la Haute Assemblée fédérale sur l’armement, le Conseil fédéral suisse se prononce fermement pour l’adoption du chargement par la culasse et ajoute : …D’après notre manière de voir, la préférence devrait être accordée aux fusils à répétition contre les fusils à culasse simple, attendu que l’arme à répétition possède à un bien plus haut degré que l’arme simple les propriétés qui caractérisèrent les armes à chargement par la culasse. Le gouvernement laisse aux représentants du peuple la responsabilité de décider son adoptera l’arme simple ou l’arme à répétition.

Ces vues témoignent d’une prescience rare ; en Europe, il n’y a aucun précédent.

La France introduira le Lebel vingt ans plus tard, précédé en 1878 du fusil Kropatschek pour sa marine, L’AIlemagne modifiera en 1884 le Mauser 1871 en y adaptant le système Kropatschek du ma­gasin-tube sous le canon. L’Italie attend 1887 pour compléter, par un magasin, son Vetterli-Vitali, L’Autriche, après un es­sai en 1886, adopte en 1888 la répétition d’après le système Mannlicher où la boîte-magasin fait corps avec le pontet ; enfin l’Angleterre fournira à son armée, après des essais poussés, le Lee-Medfort, mo­dèle 1889, avec magasin à 10 cartou­ches.

Les systèmes à répétition permettent de tirer chaque cartouche en deux secondes, alors qu’il en faut cinq à sept pour l’arme à un coup. L’avantage de la suppression d’un travail mécanique, à un moment cri­tique d’un combat, est mis en balance dans l’esprit des militaires du temps avec le risque, pour le soldat, de tirer inutile­ment et d’épuiser ainsi très vite ses mu­nitions. Il faut reconnaître qu’avec la pou­dre noire la vue de l’adversaire est voilée par la fumée et qu’alors, si on ne laisse pas à ce nuage la possibilité de se dissiper – avec largement le temps de recharger – le tir a lieu « au jugé’. C’est la raison de l’estimation des écrivains militaires : 10000 cartouches pour chaque homme hors de combat.

Sans tenir compte de la circonspection des chefs d’armée en Europe, en dehors de tous préjugés, l’Assemblée fédérale dé­crète, avec vingt ans d’avance répétons-le, le 20 juillet 1866 : … il est adopté pour les carabiniers et l’infanterie de l’armée fé­dérale (élite et réserve) une arme à répé­tition.

La Commission d’essais des fusils poursuit ses travaux; en janvier 1866 déjà, elle teste le fusil Henry et constate la précision et les qualités de l’arme. En octobre de la même année, elle a en mains le fusil Winchester, c’est-à-dire le même fusil, mais avec la trouvaille géniale du remplis­sage du tube-magasin sous le canon, par l’ouverture latérale ménagée sous la cu­lasse.

Les perfectionnements qui en résultent sont appréciés ainsi par la Commission :

…ils sont si marquants que ce n’est que depuis qu’ils ont été faits que le fusil Henry est devenu une véritable arme de guerre.

tandis qu’auparavant il n’avait aucun avan­tage sur les fusils à un seul coup du mo­ment que l’on avait épuisé le magasin.

Aussi la proposition est faite aux autorités fédérales, le 12 octobre 1866, d’acquérir 8 000 fusils Winchester pour les carabi­niers mais à la condition que l’arme soit construite au calibre suisse de 10,5 mm et non au calibre du constructeur de 11,17 mm (.44) et avec la cartouche char­gée de 4g de poudre au lieu de 1,8g.

Le « perfectionnisme » suisse se remarque déjà avec la volonté d’unification… Celle-ci inscrira dans l’histoire de l’armement le nom de Vetterli qui parviendra, partant de la Winchester au fusil qui porte son nom et qualifie une époque de l’armement hel­vétique ; le temps du Veterli.

Donc, le 28 novembre 1866. le Conseil fédéral adresse à l’Assemblée fédérale un long message traitant du nouvel arme­ment. Il envisage l’achat de 90 à 110 000 fusils Winchester  mais à condition que ceux-ci soient construits en Suisse. « La branche d’industrie nationale qui s’oc­cupe de cette partie a pris un beau dé­veloppement bien qu’elle doive lutter avec de grandes difficultés et elle a droit à des égards. » Le message apporte une préci­sion importante: …les machines des usi­nes de New Haven construisent le fusil Henry mais les fusils Winchester expédiés en Suisse pour les essais sont faits à la main… donc un long délai s’avérera néces­saire pour l’achèvement de l’armement fé­déral. délai accentué encore par la modi­fication du calibre et les recherches exigées par l’établissement de la munition ( 160 car­touches par fusil).

LA PREMIÈRE MENTION DU VETTERLI

La Commission technique comprend que le nouveau fusil à répétition au calibre et à la cartouche suisse doit être créé en Suisse. Dans le courant de septembre 1867, elle essaie à Thoune diverses ar­mes, entre autres … un fusil a 13 coups présenté par l’armurier Fetterli (sic) paraît réunir toutes les qualités désirables et sera vraisemblablement le modèle définitif.

L’opinion publique, dans tout le pays, se passionne pour ces problèmes de l’arme­

ment et bouscule les experts. L’atmo­sphère est tendue en Europe ; pour le peuple suisse, une arme efficace aux mains des soldats est la plus sûre pro­tection contre une agression possible. Le chroniqueur bernois de la Revue militaire suisse, dans le numéro du 4 novembre 1867, exprime l’amertume de ceux qui at­tendent :…Quant au modèle définitif… on le cherche toujours. C’est maintenant un fusil Vetterli, soit Winchester très perfec­tionné et simplifié qui est le bijou à la mode, sous la réserve, bien entendu que M. Amsler (l’armurier qui avait transformé les fusils pour le chargement par la culasse)  le favori de la Commission technique, n’an­nonce pas bientôt quelque chose de mieux. Les vues à ce sujet sont encore tellement dans le pot au noir qu’il serait même ques­tion de revenir de l’idée d’un fusil à répé­tition à celle du fusil simple… Qu’on se hâte d’en finir avec les essais et les perfection­nements. Qu’on se hâte d’avoir des armes et non plus des projets… Sera-t-il dit que grâce aux lenteurs de notre Commission technique, la Suisse sera la dernière en Eu­rope munie de son armement ? Ah ! les gens qui veulent tout accaparer pour eux, qui entreprennent tous les métiers et qui finalement ne savent rien faire à temps, se chargent d’une lourde responsabilité devant le pays.

FREDERIC VETTERLI

Johann-Frédéric Vetterli (1822-1882) originaire de Wagenhausen dans le canton de Thurgovie, entre en apprentissage chez un armurier de Schaffhouse. Il perfectionne ses connaissances à Paris, à la manufacture d’armes de Saint-Etienne et à Londres ou il prend femme à l’âge de 33 ans. Le grand patron de la jeune Société industrielle Suisse à Neuhausen, créée en 1853 pour construire des wagons, développée en 1860 par une section « armement », lui offre le poste de second directeur technique et Frédéric Vetterli entre en fonctions le 24 juin 1864. Nous trouvons, dans les savoureux mémoires d’Edouard Burnand, inventeur du système Prélaz-Burnand de 1867, et directeur du département « armes » de la S.I.G., la relation de la trouvaille de Vetterli en 1867, pour la construction d’une arme nouvelle en partant du Dreyse (fermeture dans l’axe du canon) et du Winchester (tube-magasin et transporteur). Frédéric Vetterli : …arrive dans son bureau en criant, eurêka ! J’ai trouvé le véritable fusil à ré­pétition. Et, ouvrant le pouce et l’index, fer­mant les autres doigts, il forme une équerre comme pour une sonnette. Il presse sur le bout du pouce, l’index se relève; c’est la branche qui élèvera le transporteur. L’inven­tion était faite, mais il fallait la mettre au point. Un ouvrier, fort intelligent, Elternich fournit un  précieux secours pour la mise en œuvre  de ce fusil qui va marquer la fin de ce siècle.

LA LONGUE ROUTE

Donc, en 1867, les milieux que cela concerne apprennent la prochaine diffu­sion de l’arme à répétition due à Frédéric Vetterli. Le 6 mars 1868, le Conseil fé­déral l’accepte et décide de mettre au concours la fabrication en Suisse de 80000 exemplaires. La mise au concours est annoncée quelques jours après, le 19 mars, avec un délai au 1er mai 1868 pour la remise des offres au département militaire fédéral. Les fabri­cants intéressés peuvent voir le modèle du fusil à répétition déposé au bureau de l’administration du matériel de guerre. La solution semble assez avancée pour que l’ordonnance, précisant les modalités d’exécution, soit publiée le 8 janvier 1869 et les conventions avec sept constructeurs signées vers le milieu de février. Mais, lors des exercices des écoles de tir de Bâle, au cours de 1869 (août et octobre), où une centaine de nouveaux fusils sont entre les mains de la troupe, il est néces­saire, souvent sur l’initiative de l’inventeur, d’apporter quelques changements impor­tants. Ceux-ci conduisent à un remanie­ment des types et des machines cause de retards considérables dans la livraison des fusils terminés conformes à l’ordon­nance. Ce que ce rapport ne dit pas, c’est que non seulement les modifications étaient cause de retard, mais qu’il y eut aussi une erreur administrative monumen­tale, les instructions de fabrication sont mises en œuvre non par l’inventeur, mais par la maison d’Erlach de Thoune. … De là, entre l’administration du matériel et le contrôleur chef, entre le contrôle et les fa­bricants, entre l’inventeur et l’administra­tion, des tiraillements qui avaient absorbé un temps précieux ! Le rapport de la Com­mission du Conseil des États sur la ges­tion du Conseil fédéral pour 1869, qui donne ces renseignements, se termine par l’indication du nombre de fusils livrés à fin mai 1870: 60 exemplaires !.

Jusqu’à quel point les essais « privés » des sociétés militaires du pays – largement publiés et pas toujours favorables au nou­vel armement – ont-ils perturbé l’avance­ment des travaux ? Certainement pour une part non négligeable. Enfin, la qua­trième édition des planches officielles donne le modèle parfaitement définitif’.

Un an après les « échantillons » cités ci-dessus, l’armée dispose de 12531 fusils vérifiés et à fin mai 1872, de 48 368 fusils. On est 4ncore loin des 119 000 pièces représentant le total des commandes.

 LE VETTERLI EN EUROPE

Citons rapidement une incursion du fusil Vetterli en Angleterre, devant le Comité chargé par le ministère de la guerre du choix d’un modèle définitif se chargeant par la culasse ; l’opinion des membres de ce Comité est favorable à l’arme à un coup : c’est le Martini-Henry qui sera adopté. Toutefois, les experts étudièrent le comportement de quatre systèmes à répétition dans les derniers mois de 1868. Le Vetterli fut opposé au Winchester ; ce dernier est jugé plus simple et mieux adapté à ce que l’on demande d’une arme militaire. En France, les démarches du colonel Edouard Burnand, directeur de S.I.G., sont patronnées par Gastinne-Renette, père et fils et ont lieu au camp de Châlons en septembre 1868. L’empereur, emballé par les résultats de l’arme, tient à obtenir 50000 mousquetons pour sa cavalerie. Le général Lebœuf, commandant le camp de Châlons, s’oppose à cet achat en fai­sant état du nombre de ses chassepots.

Le Vetterli est encore présenté à l’Egypte qui le fait essayer à Vincennes, devant Minié et Nessier, puis à Madrid, sans succès. A Turin, il tire à 500 mètres avec des ré­sultats si enthousiasmants que, le dernier jour des essais on réunit sur la place de tir un régiment d’infanterie et un de ca­valerie pour faire apprécier aux soldats l’arme que l’on allait mettre en leurs mains. Le résultat : un traité pour la ces­sion d’un brevet italien jusqu’à 500 000 armes. C’est le Vetterli à un coup, puis à magasin (1887), remplacé par le Paraviccino-Carcano en 1891. Ce fusil pré­sente la particularité d’avoir subi deux transformations importantes : la répétition en 1887 et la diminution du calibre à 6,5 mm par tubage du canon, en 1915.

LES PRIMES D’INVENTION

Donc, le 29 mai 1865, le département mi­litaire fédéral ouvre un concours auprès des « inventeurs-armuriers » ou « fabricants » pour un fusil modèle se chargeant par la culasse. Le texte prévoit expressé­ment une prime de 20 000 F pour récom­penser l’inventeur du système adopté. Cette prime sera répartie entre M. Amsler pour le système de transformation (8 000 F) et la Société Industrielle Suisse pour le fusil à répétition (10000 F). Or, la décision d’adjudication de la prime relève que le Fusil Vetterli est un système mixte, entre l’américain Winchester et le fusil prussien. La traditionnelle loyauté hel­vétique fut là en défaut : ni M. Milbank, ni la firme Dreyse, ni encore M. Olivier Winchester ne participèrent à la distribu­tion de la manne fédérale – ni même aux remerciements – pour leurs apports indis­cutables à l’armement suisse. Avec un siè­cle de retard, disons-leur merci ! et à nous… dommage !.

Fonctionnement

Les cartouches sont introduites dans le tube-magasin, sous le canon, par l’ouver­ture prévue à cet effet sur le côté droit de la boîte. Une cartouche est dans l’auget-transporteur, une autre dans le canon. En appuyant sur la détente, la gâchette articulée s’abaisse, la broche sous l’action du ressort est projetée en avant et frappe par un double choc de sa fourchette contre le bourrelet de la cartouche qui contient le fulminate et fait explosion par écrasement. La percussion ne se fait donc pas au centre de la cartouche mais à la périphérie du culot.

En retirant en arrière le cylindre obtura­teur, l’extracteur dégage la douille vide de la chambre et l’expulse au-dessus de l’arme. L’auget-transporteur s’élève et présente, devant le canon, la cartouche qu’il contient. Le mouvement en avant du cylindre obturateur pousse la cartouche, remet l’auget à sa place, en face du tube-magasin, lui permettant ainsi de recevoir une nouvelle cartouche. Le magasin peut être réapprovisionné en cours de tir.

Dimensions

Fusil à répétition, modèle 1869:

– Longueur totale : 1 300 mm ;

– Longueur du canon en acier fondu bronzé : 842 mm ;

– Longueur du canon hors de la boîte de culasse : 820 mm ;

– Calibre : 10,4 mm ;

– Poids total sans bretelle : 4 850 g (Waffenfabrik-Bern, nr 143248);

– 4 rayures concentriques : un pas sur 660 mm, largueur 4,5 mm, profondeur 225 mm ;

– Mécanisme d’obturation : par cylindre ;

– Magasin : tube sous le canon à 11 car­touches (plus une dans l’auget et une dans le canon);

  • Hausse: à cadran, graduée de 100 en 100m de 400 jusqu’à 1000m.

Cartouches :

– Longueur totale : 56 mm ;

– Poids total : 30,4 g ;

– Poids de la balle: 20,13g;

– Plomb dur :

– Pointe : arrondie ;

– Poids de la charge : 4 g de poudre noire ;

– Vitesse initiale à 25 m : 408 m/sec;

– Portée maximale : 2 800 m ;

– Élévation : 27° ;

– Longueur de l’étui : 38 mm en tombac (94 % de cuivre et 6 % d’étain) ;

– Inflammation : périphérique

-Cadence de tir avec magasin: 21 coups/minute.

 

Baïonnette :

– D’estoc à quatre carres: douille avec anneau ;

– Longueur de l’estoc : 480 mm.

Cette baïonnette est semblable à celle du fusil d’infanterie 1863, mais un peu plus légère : 290 g contre 365 g, par amincis­sement des carres.

 

Fusil de cadet, modèle 1870, numéro 3909, arme à un coup :

– Longueur totale: 1 130mm;

– Longueur du canon hors de la boîte de culasse : 659 mm ;

– Calibre : 10,4 mm ;

– Poids total sans bretelle: 3240g;

  • Hausse à cadran graduée : de 225 à 600m.

Projectile :

– Comme celui du fusil;

  • Poids de la charge : 3 g.

Il existe un premier modèle avec tôle de fermeture entourant la fenêtre d’expulsion de la cartouche qui est située sur le côté droit de la culasse.

 

FUSIL A RÉPÉTITION, MODÈLE 1871

 Quelques modifications sont apportées au modèle de 1869. Voici les principales: le couvre-culasse et le fermoir du magasin sont supprimés, la sous-garde est séparée en deux parties, celle du modèle 1869 servait de support pour le levier coudé (voir photographie mécanisme) et il fallait donc l’enlever pour sortir le transporteur. Dans le nouveau modèle, la partie anté­rieure – support du levier coudé – est in­dépendante et s’enlève seule pour le dé­montage. La largeur des anneaux passe à 15 mm afin de répartir la pression sur une plus grande surface et éviter de com­primer le tube-magasin lors du serrage des vis. Le canon est octogonal sur 75 mm au lieu de 65 mm. La feuille de hausse est allongée.

 

CARABINE A RÉPÉTITION. MODÈLE 1871

Le Vetterli de l’infanterie est bientôt suivi de l’arme des carabiniers, à double dé­tente, déterminée par la décision des au­torités fédérales du 27 février 1871. La carabine est moins longue que le fusil, son canon est maintenu par un anneau (au lieu de deux sur le fusil) et l’embouchoir est fixé par une vis traversante au lieu du te­non à ressort à ergot sur le fusil. Sur les premiers exemplaires construits, une tôle enveloppante glisse pour fermer l’ouver­ture d’éjection alors qu’une plaque obtu­ratrice est placée à l’entrée du magasin. La crosse est aussi plus courte, de sorte que la longueur totale des premières ar­mes est de 1 425 mm et le poids de 4 620 g avec la bretelle ; deux canaux d’évacuation des gaz sont ménagés au-dessus de la chambre à cartouche, jusqu’en 1877.

Dimensions

(voir fusil pour les renseignements non ci­tés):

– Longueur totale : 1 260 mm ;

– Longueur du canon : 783 mm ;

– Longueur du canon hors de la boîte de culasse : 762 mm ;

– Calibre: 10,4mm;

– Poids total sans bretelle : 4 540 g ;

  • Magasin: 10 cartouches, plus une dans l’auget et une dans le canon, double dé­tente : système Thury.

L’embouchoir est maintenu par un tenon à ressort à ergot au lieu de la vis tra­versante sur les premiers exemplaires.

 

FUSIL A RÉPÉTITION. MODÈLE DE 1878

Dans ce modèle apparaît la recherche du mieux de nos armuriers. Deux douzaines au moins de modifications améliorent l’uti­lisation de l’arme. Notons ci-dessous les plus marquantes, mais auparavant disons qu’une commission spéciale, nommée en 1877 par le département militaire fédéral, est responsable des changements propo­sés pour le fusil et la carabine. Son ex­pertise a conduit à une sensible amélio­ration de l’emploi des armes. Le nouveau modèle est prescrit par la décision du Conseil fédéral du 30 avril 1878, toute­fois, l’ordonnance d’application n’est pu­bliée qu’en mars 1879.

Modifications

A l’embouchoir est soudé, à droite : le te­non, pour la nouvelle baïonnette que nous présenterons ci-après. Le canon est main­tenu contre le fût par un seul anneau au lieu de deux. Le bois est lisse, sans le qua­drillage de prise pour la main gauche du modèle précédent. L’allongement des joues du pied de hausse permet d’insérer entre elles, presque complètement, la feuille de hausse qui est ainsi protégée contre les chocs. La graduation de 225 à 1 200 mètres est marquée et permet de décider des distances de 50 en 50 mètres; les deux canaux à gaz sont sup­primés. La boîte de culasse porte à gau­che le nom du fabricant, le numéro de l’arme et M 78. La détente a été allongée pour rendre le départ du coup plus facile. L’éperon de sous-garde assure une meil­leure pression du médius. L’allongement de la détente a obligé celui de la crosse qui est équipée d’une plaque de couche concave, comme celle de la carabine.

La modification la plus importante est celle de la baïonnette : l’ancien modèle d’estoc est remplacé par une longue ba­ïonnette-scie en fourreau de cuir.

Dimensions

– Longueur totale : 1 325 mm ;

– Longueur du canon : 843 mm ;

– Longueur du canon hors de la boîte de culasse : 822 mm ;

– Poids total sans bretelle : 4815g.

Comme là carabine 1881, le fusil 1878 comporte une fourchette de percussion de rechange dans une cavité sous la pla­que de couche. Les collectionneurs de ces armes, qui connaissent ce détail, trouvent très souvent la fourchette neuve à sa place.

Baïonnette-scie

– Longueur totale : 600 mm ;

– Longueur de la lame : 480 mm, pan creux d’un côté ;

– Pointe à deux tranchants dans l’axe;

– Poids : 485 g ;

  • Fourreau : en cuir noir pressé, gouttières de chaque côté. Il y aura jusqu’à la fin du Vetterli sept types de baïonnettes et trois modèles de fourreau.

CARABINE MODÈLE 1878

Cette arme se confond pratiquement avec le fusil modèle 1878, à l’exception de la double détente, celle de Thury ayant été modifiée par R. Schmidt. La baïonnette est semblable à celle du fusil.

 

FUSIL A RÉPÉTITION. MODÈLE DE 1881

La différence avec le modèle de 1878 ré­side dans le système de visée mis au point par Rudolf Schmidt. Les joues de protection du pied de hausse sont un peu plus hautes, celle de gauche est graduée à l’extérieur de 250 à 1 200 mètres, de 50 en 50 mètres; dans sa position infé­rieure, la hausse correspond toujours à 225 mètres. La feuille de hausse se meut à l’intérieur des joues, mais elle est ac­compagnée à gauche par une lame de renfort. Pour tirer aux distances de 1 250 à 1 600 mètres, une rallonge à glissière sort de la feuille de hausse, mais alors le cran de mire domine le canon de 94 mm I La boîte de culasse porte à gau­che le nom du constructeur, le numéro de l’arme et M 81. Les dimensions et perfo-mances sont celles du fusil modèle 1878.

 

CARABINE A RÉPÉTITION. MODÈLE DE 1881

Elle a la même ligne que le fusil, même plaque de couche, hausse semblable. Il a été fortement question, à l’époque, de supprimer la double détente pour réaliser la complète uniformité des armes de l’in­fanterie, mais cette tentative s’est heurtée à la volonté farouche des carabiniers de conserver leur principale distinction vis-à-vis des fusiliers, la « détente carabinière »… Au stand, celle-ci est favorable puisque le poids normal de 2 500 g est abaissé à 250g!

 

Les armes des corps spécialisés

MOUSQUETON DE CAVALERIE

… C’est à contre-cœur que la cavalerie est entrée en campagne avec des pistolets à canon lisse. La carabine qui, depuis quel­ques années, a été introduite à titre d’essai dans plusieurs écoles et cours, paraît jouir d’une grande popularité et si l’on réussit à établir une arme qui réunisse les conditions d’efficacité, de portée et de poids désirables, la cavalerie la recevra avec plaisir. Un re­volver sera de même bien accueilli par tes sous-officiers et trompettes aussitôt qu’un modèle convenable aura été adopté…

Donc, une première carabine de dragons est construite en 1871 avec un levier d’armement dessiné avec un épaississe-ment progressif, sans boule de prise, l’en­trée des cartouches et la culasse possé­dant leur dispositif d’obturation. Deux ca­naux pour l’évacuation des gaz sont amé­nagés à travers le canon.

Ce modèle est vite modifié : le levier de­vient classique avec sa boule terminale, la partie « prise » du fût quadrillée. Dès 1874, la hausse est prévue, suivant le système Schmidt, pour tirer à 600 mètres. La pro­tection de la culasse est supprimée, tou­tefois la fermeture du magasin subsiste. Dès 1878, on ne voit plus les deux ou­vertures pour les gaz.

Dimensions

– Longueur totale : 930 mm ;

– Longueur du canon : 470 mm ;

– Longueur du canon hors de la boîte de culasse : 448 mm ;

– Calibre: 10,4mm;

– Poids sans bretelle : 3 330 g ;

– Rayures : quatre ;

– Pas : un tour sur 550 mm au lieu de un tour sur 660 mm pour le fusil ;

-Vitesse initiale: 375 m/sec.;

– Tube-magasin : 6 cartouches plus une dans l’auget et une dans le canon ;

– Hausse : feuille de hausse se déplaçant entre les deux joues. Celle de gauche est taillée afin de ménager  une partie plate sur laquelle les traits marquent les distan­ces de 100 m en 100 m jusqu’à 600 m ;

– Pas de baïonnette.

MOUSQUETON A REPETITION POUR GARDE-FRONTIERES, MODELE 1878

En 1878, une petite série de mousque­tons est fabriquée ; il s’agit de l’armement des garde-frontières qui sort à 400 exem­plaires. Cette arme se présente comme le fusil de dragon, mais l’extrémité du canon est dégagée du fût et il y a un tenon pour la baïonnette-scie.

Dimensions

– Longueur totale : 945 mm ;

– Longueur du canon : 485 mm ;

– Longueur du canon hors de la boîte de culasse : 462 mm ;

– Poids sans bretelle : 3 540 g ;

– Hausse : de 225 m à 600 m comme celle du mousqueton de dragon.

MOUSQUETON A RÉPÉTITION POUR GARDE-FRONTIÈRES, MODÈLE 1895

280 mousquetons de dragon sont modi­fiés en 1895 pour être utilisés par les garde-frontières. C’est l’arme de la cava­lerie complétée par une bretelle, donc par un anneau soudé sous l’embouchoir. Ce mousqueton fait partie de la famille des Vetterli qui s’est répandue dans des em­plois mineurs. Le petit nombre d’armes ainsi transformées augmente encore l’in­térêt de celles qui subsistent.

 

***

Le système Vetterli comprend toute une famille d’armes avec les carabines, les mousquetons, le fusil de cadet. Tout au long de ses vingt années de service, il su­bit des dizaines de changements et d’améliorations de détail (le « perfection­nisme » helvétique). Lorsqu’il sera remplacé par le Schmidt-Rubin de 1889, les arse­naux fédéraux emmagasineront ces armes jusque vers 1950, date à laquelle les der­niers exemplaires seront cédés pour… trois francs ! Toute collection suisse d’armes d’ordonnance commence par le Vetterli… mais à un autre prix que les trois francs d’il y a un quart de siècle !

LE CHARGEMENT PAR LA CULASSE SUIVANT LE SYSTÈME AMSLER-MILBANK 1867

 

Avec la balle à expansion et le fusil rayé de petit calibre, l’armurier était parvenu au terme de la longue marche qu’il suivait de­puis la mention, par Graziani, du trait à pou­dre portatif utilisé par les gens de guerre de Perugia en 1364.

SI les soldats de 1865 envoyaient leurs balles plus loin, avec plus de précision que les mousquetaires de Louis XIV ou les grognards de Napoléon, ils ne tiraient pas plus vite : deux coups par minute. Or, en trente secondes, un fantassin courait sur 100 mè­tres, disposant ainsi d’une liberté de manœuvre, entre deux salves, bien gênante pour l’adversaire. Pour inquié­ter l’assaillant, il aurait fallu ne pas espacer les rafales de plus de cinq secondes ! Possible, mais en engageant, à la fois, le sixième des tireurs seulement…

Un expert militaire admet que lorsqu’un ennemi, à 500 pas, s’avance au pas de course pour charger à la ba­ïonnette, la troupe assaillie ne peut tirer que quatre fois avant le choc ; la possibilité de mise hors de combat des attaquants est donc réduite avec les conséquences qui en résultent pour les attaqués s’ils sont inférieurs en nombre.

On a cherché très vite à restreindre le temps de charge en préparant à l’avance une « chambre » contenant la poudre et la balle introduite à l’arrière du canon. Il existe à Londres deux arquebuses d’un tel type qui ont ap­partenu à Henry VIII (1491-1547). L’une est datée 1537; sur la culasse, un couvercle à charnière s’ouvre de côté. Il existe encore neuf exemplaires de ces cham­bres d’acier prévues pour recevoir la charge. Charles-Quint appréciait aussi ce système ; son armurier, Peter Pech, avait construit pour lui, en 1553, une arquebuse à mèche à chargement par la culasse. Elle est conservée au musée bavarois de Munich.

L’histoire de l’armement est jalonnée de ces tentatives : celle de l’ingénieur français. Isaac de la Chaumette, est décrite dans la publication de l’Académie royale des sciences de 1704. Elle consiste en un bouchon à vis traversant toute la culasse de bas en haut. Ce bouchon est solidaire du pontet de sous-garde utilisé comme poi­gnée d’action. En se dévissant, le bouchon s’abaisse et dégage une entrée dans le canon par laquelle on in­troduit la balle et la poudre ; une platine à silex assure la mise à feu.

Patrick Ferguson (1744-1780) perfectionne l’invention de la Chaumette. Après des démonstrations éblouissan­tes – quatre coups par minute – il obtient la fourniture de son armement pour un détachement qui allait se joindre aux troupes anglaises chargées de mater la ré­bellion des Etats d’Amérique (1776).

En 1814, le chargement par la culasse frôle la solution définitive avec l’invention du bernois Samuel-Johannes Pauly (1766-1828). Il réalise l’unité de cartouche en réunissant, en un étui unique, l’amorce, la poudre et la balle. La longue culasse de son fusil, prolongée par un levier, se soulève en dégageant l’entrée du canon. Le percuteur à aiguille est solidaire d’un chien servant de levier d’armement. L’invention soumise à Napoléon alors qu’il arrivait à Paris après la désastreuse campagne de Russie, est repoussée, son intérêt très réel étant mineur par rapport à l’écrasante tâche consistant à briser la coalition des pays étrangers luttant contre la France.

L’invention de Pauly sera reprise par un de ses anciens ouvriers Jean-Nicolas Dreyse (1787-1867) qui fournit alors à la Prusse, en 1841, un fusil à chargement par la culasse, prototype de l’armement conventionnel que nous connaissons maintenant.

Les autorités militaires des grandes puissances admet­tent, vers les années 1850, la nécessité d’améliorer la puissance de feu de l’infanterie ; mais comment aug­menter la rapidité du tir ? On ne peut gagner aucune seconde sur la mise en joue, la visée, le départ du coup ; c’est donc du côté de la charge, sur la mise en place du projectile dans le canon, qu’il faut chercher. Seul, le chargement par la culasse – et avec une cartouche complète – permettrait d’intensifier la densité du feu.

Au cours de son histoire, la Suisse a toujours mis l’ac­cent sur l’action individuelle de ses soldats ; il faut donc leur fournir le fusil le meilleur. Or, les armes à char­gement par la culasse viennent de subir la dure épreuve des champs de bataille: guerre de Sécession (1861-1865), guerre du Danemark (1864), campagne de Bo­hême (juin-juillet 1866) opposant la Prusse à l’Autriche. Les experts militaires associent d’ailleurs le succès fou­droyant de l’armée prussienne à son fusil à chargement par la culasse, surclassant nettement celui de l’infanterie autrichienne qui se charge encore par la bouche.

Les autorités suisses sont placées devant trois obliga­tions :

– Il faut, pour toute l’armée, la nouvelle forme de char­gement ;

– Celle-ci doit être introduite très vite, car les armées étrangères s’affrontent aux frontières ;

– La Suisse doit faire respecter l’intégrité de son ter­ritoire.

On vante fort, maintenant, les armes à répétition qui ont été appréciées pendant la guerre de Sécession : ca­rabines Spencer et Henry, cette dernière décrite comme : … une des meilleures armes à répétition qui aient passé entre les mains des experts… Comme on le verra, c’est le facteur « rapidité de transformation » qui déterminera la décision.

Le département militaire comprend la nécessité d’as­socier les inventeurs d’Europe et d’Amérique à ses étu­des. Aussi, le 29 mai 1865, il publie le texte qui met au concours … un fusil modèle se chargeant par la cu­lasse  avec une prime de 20000 F pour le réalisateur du système qui sera adopté pour l’armement fédéral.

Les concurrents présentèrent cinquante et un fusils dont quatre seulement furent sélectionnés pour des essais ultérieurs, ceux de : Joslyn, Peabody, Milbank et Hugel. Un certain nombre de nos fusils devaient être trans­formés d’après ces quatre systèmes, par un … habile mécanicien, M. Amsler à Schaffhouse.

L’approbation du nouveau système dépend de « l’arrêté fédéral concernant les fusils se chargeant par la cu­lasse » du 20 juillet 1866. La commission d’experts, composée de cinq colonels et d’un lieutenant-colonel prend très vite une décision, puisque le 26 juillet 1866

– six jours après l’arrêté acceptant le principe du char­gement par la culasse – elle se réunit à Berne pour fixer le programme des essais.

Il y a eu, en 1866, trois séries d’essais avec des armes diverses. Le fusil d’infanterie et le fusil de chasseur, transformés par M. Amsler, furent comparés à d’autres, par exemple l’Enfield-Snider, le Chassepot, le Henry. Les fusils Prélaz-Burnand ne sont pas encore « sous la loupe » parce que leur transformation est une question non encore éclaircie et demande de nouveaux essais, mais l’éclaircissement viendra lors des essais de l’au­tomne 1866.

MUNITIONS

On a fait venir d’Amérique vingt-deux machines pour la fabrication des douilles, y compris les cartouches de cuivre. …Après que l’Assemblée fédérale aura décrété l’introduction des fusils se chargeant par la culasse et en même temps aussi celle de cartouches uniformes on pro­cédera dans la fabrication de capsules à des essais pour la confection des enveloppes métalliques de ces cartou­ches… … Dans le cours de la seconde moitié de l’année trois machines déjà se trouvaient organisées pour la nou­velle fabrication… …On a déjà commandé en Amérique de nouvelles machines.

Voici les caractéristiques des nouvelles munitions :

GROS CALIBRE:

– Hauteur totale : 40 mm, étui en tombac (93 % cuivre, 7 % zinc), hauteur 25 mm ;

– Calibre: 17,8mm, calibre du bourrelet 21mm;

– Projectile : plomb, conique, pointe aplatie avec une gorge à bord arrondi, sertie dans l’étui, expansion as­surée par une cavité en tronc de cône, profondeur 11,5 mm ;

– Poids de la cartouche: 51,360g;

– Poids de la balle: 40,470g;

– Longueur de la balle : 24,5 mm ;

– Vitesse de tir : 6-8 coups par minute (2 coups avec le chargement par la bouche!);

– Charge : 4,5 g de poudre noire n° 4.

PETIT CALIBRE:

– Longueur totale : 56 mm ;

– Poids total : 30,5 g ;

– Longueur de la balle à expansion : 25,5 mm ;

– Poids de la balle: 20,4g;

– Calibre: 10,5 mm;

– Longueur de l’étui : 38 mm, tombac ;- Charge : 3,6 g, poudre noire ;

– Forme de la balle : plomb, pointe arrondie, 4 rainu­res;

Vitesse initiale: 440 m/sec;

– Percussion : annulaire.

LES ESSAIS

Les experts divisent en trois groupes les fusils essayés. Dans l’un, la pièce de fermeture de la culasse se meut entièrement – ou en partie – à l’intérieur du fusil. C’est à cette catégorie qu’appartiennent les fusils Henry, Peabody. Spencer, Remington.

Le second groupe comprend les systèmes se fermant au moyen d’un clapet qui se meut sur une charnière; ce sont les Milbank, Joslyn et Amsler.

Le troisième groupe se rapporte aux armes dans les­quelles la fermeture est assurée au moyen d’un cylindre qui avance et recule dans l’axe du canon. Le type en est le fusil à aiguille prussien, avec une platine d’un mo­dèle tout à fait spécial.

On voit immédiatement que les armes du second groupe se prêtent particulièrement à une transformation des armes se chargeant par la bouche, parce que la pièce de fermeture peut s’adapter à l’extrémité raccour­cie du canon sans que la platine soit touchée et sans avoir à modifier une autre partie de l’arme. C’est la so­lution simple, rapide et économique et c’est la solution de M. Isaac Milbank de Greenfield-Hill (Connecticut, Etats-Unis) qui fait breveter son clapet le 5 septembre 1867. Ce système sera encore amélioré par Jacob Amsler (1823-1912), armurier à Schaffhouse. Il pré­sente le grand avantage d’admettre un extracteur ef­ficace.

La commission propose donc, dans son rapport du 12 octobre – et sur le résultat des essais de l’automne 1866 – la transformation des armes de petit calibre, suivant le système AmsIer-Milbank.

LE CLAPET AMSLER-MILBANK

II est contenu dans une carcasse prolongeant le canon et qui vient s’y visser. Le couvercle se soulève d’arrière en avant ; sous ce couvercle, une pièce cylindrique, for­mant obturateur, vient buter contre le culot de la car­touche. Un verrou rectangulaire, mobile, prolonge à l’ar­rière le clapet et s’engage, en oblique, dans la boîte de culasse. Les gaz de la poudre, agissant dans l’axe du canon, pressent le verrou qui, à cause de son appui en oblique, ne peut se soulever ; la fermeture est ainsi solidement maintenue.

Si l’on soulève le verrou à l’aide du gros bouton qui le prolonge à droite, il se dégage de l’oblique, s’élève et entraîne le clapet dont il est solidaire. C’est vraiment la solution parfaite, efficace et économique et il faut souligner la perspicacité des inventeurs qui ont imaginé un tel système. Il suffit de raccourcir le canon en sup­primant la masselotte de la cheminée dont l’emplace­ment subsiste, sans gêne, dans la plaque de platine où rien n’a été modifié. Le chien s’abat sur la tête de la broche percutante dont la pointe pénètre de un mil­limètre environ dans le fond métallique de la cartouche (inflammation périphérique).

Dans les armes de gros calibre (Prélaz-Burnand) l’ex­tracteur, solidaire du clapet, est à gauche ; celles de pe­tit calibre (carabines et fusils de chasseurs) l’ont à droite. Dans ces dernières, le gros bouton à droite est rem­placé par une languette qui prolonge le clapet vers l’ar­rière.

LES FUSILS DE GROS CALIBRES

Leur transformation n’est plus alors qu’une affaire de chronologie. Après la mise au point du clapet et de la munition pour le petit calibre, les études continuent et sont caractérisées par le texte de la circulaire que le département militaire de la Confédération suisse adresse aux autorités militaires des cantons le 7 mai 1867 : … Le Conseil fédéral a maintenant fixé les ordon­nances pour la transformation des fusils de grand et de petit calibre en fusils se chargeant par la culasse … Chargé de l’exécution des décisions du Conseil fédéra/, le département a pris /es mesures tes plus complètes pour pousser avec la plus grande énergie les travaux de trans­formation… Suit la liste des ateliers chargés de la mo­dification des fusils de grand calibre:

– MM. Socin et Wick à Bâle;

– Escher, Wyss et C » à Zurich ;

– Suizer à Winterhour ;

– Wahl et Aemmer à Bâle.

LES FUSILS DE PETITS CALIBRES

Ils ont été répartis entre vingt-cinq ateliers dont ceux de la S.I.G. à Neuhausen ; la surveillance du travail de transformation incombait au capitaine Rodolphe Schmidt de Bâle avec le titre de contrôleur-chef ; nous le retrouverons avec l’histoire du fusil de 1889.

Son rapport final sur les opérations de transformation fait ressortir combien celles-ci ont été pénibles : les en­trepreneurs paraissent s’être trompés dans leur juge­ment sur l’exécution d’un travail qui exigeait une exac­titude plus grande que celle prévue. La société indus­trielle suisse à Neuhausen fournissait aux ateliers les pièces brutes de la fermeture, mais la manière de les travailler conduisit à bien des déboires. Enfin, en juillet 1869, l’armée est en possession de 53368 fusils de gros calibres et 76 735 de petits calibres, avec des frais de transformation s’élevant à 18,20 F pour les premiers et 17,90F pour les seconds!

Cet armement restera en mains des soldats suisses jusqu’au Vetterli dont nous parlerons bientôt.

par Clément BOSSON 1975