V1 DESIGNATIONS

Le V1 a reçu plusieurs désignations successives ou parallèles au cours des différentes phases de son développement et de son déploiement. Les autorités militaires allemandes ont également utilisé plusieurs noms de code pour dissimuler la véritable nature du projet ultra-secret. Il est donc parfois quelque peu difficile de s’y retrouver dans la documentation allemande. Tentons de mettre un petit peu les choses au clair :

A la fin des années 1930, le concept à peine ébauché par les ingénieurs est encore appelé  « LUFTTORPEDO » (torpille volante), par allusion au fait que l’engin projeté est censé se diriger tout droit et par ses propres moyens vers sa cible, comme une torpille marine.

Au début des années 1940, avec la reprise du concept par FIESELER et ARGUS, le développement de la bombe volante est baptisé projet « ERFURT » (Erfurt est une ville d’Allemagne). Il s’intègre dans le cadre du programme « FERNFEUER » (tir à longue portée) qui participe lui-même du « VULKANSPROGRAMM » (programme volcan), nom de code utilisé pour le développement des armes spéciales ou secrètes.

 

Le 27 juin 1941, une version améliorée et plus ou moins finalisée du concept de la future bombe volante est présentée au Reichsluftministerium (ministère de l’air du Reich) sous le nom provisoire de « ERFURT P.35 » (P étant mis ici pour Projekt). Il ne s’agit encore que d’une esquisse, mais la silhouette générale du futur V1 est déjà définie dans les grandes lignes, notamment l’installation du propulseur au-dessus du corps de la cellule…

Le 27 avril 1942, le projet ERFURT P.35 est enfin finalisé. Le 10 juin, il reçoit l’aval du Generalfeldmarschall Erhard Milch qui décide de poursuivre son développement sous le contrôle direct de la Luftwaffe, sous le nom de code de projet « KIRSHKERN » (noyau de cerise). Pour préserver le secret, les recherches sont transférées dès le mois d’août au centre d’essais de la Luftwaffe de Peenemünde-Ouest (Erprobungstelle der Luftwaffe Karlshagen), sous la responsabilité du Generalleutnant Walther von Axthelm, commandant en chef de la FLAK allemande.

Un premier prototype est achevé et essayé dès le mois de décembre 1942. Il est officiellement baptisé FIESELER 103, conformément à la nomenclature utilisée par le RLM pour désigner les productions aéronautiques (nom du constructeur suivi par un numéro d’ordre). Ce nom est fréquemment abrégé Fi-103 dans la documentation allemande.

Le 29 juillet 1943, pour des raisons de préservation du secret, le général von Axthelm décide, au grand dam du constructeur, d’abandonner ce nom de Fi-103. L’engin est rebaptisé FLAKZIELGERÄT 76 ( engin-cible de DCA 76 ), souvent abrégé FzG-76. Il conservera officiellement ce nom jusqu’à la fin du printemps 1944.

Le 12 juin 1944, sur proposition du Dr. Goebbels et en réponse au célèbre « V » pour Victory lancé sur les ondes par Winston Churchill à l’occasion du débarquement de Normandie, Adolf Hilter décide de débaptiser le FzG-76 et de le renommer V1, abréviation de VERGELTUNGSWAFFE 1 ( arme de vengeance n°1 ). Dans son esprit, le V1 n’est que la première d’une longue série d’armes miracles en cours de développement. Ces  « Wunderwaffen » doivent apporter la victoire à l’Allemagne en 1946. Suivront le V2 (fusée A4), puis le V3 (Hochdruckpumpe), les autres V n’ayant jamais vu le jour… Le V1, de sinistre mémoire, conservera cette désignation pour la postérité.

Enfin, sur les chaîne d’assemblage des usines de production allemande, le V1 était désigné sous le nom de code de GERÄT RICHARD (engin Richard), là encore pour préserver le secret.

De leur côté, les Britanniques, confrontés à l’offensive des V1 dès le 13 juin 1944, adoptèrent différents surnoms pour désigner la bombe volante :

 

FLYING BOMB          « bombe volante ».

FLYING TORPEDO  « torpille volante» .

BUZZ BOMB             « bombe bourdonnante», par allusion au vrombissement caractéristique du pulsoréacteur dont le bruit modulé rappelait celui d’un moteur à deux temps mal réglé.

CHUFF BOMB          « bombe haletante », là encore par allusion au vrombissement saccadé du pulsoréacteur, dû au cycle très rapide d’ouverture et de fermeture des clapets d’admission d’air qui produisait 45 à 47 détonations par minute dans la chambre de combustion.

DIVER                         « plongeur », par référence au piqué mortel de l’engin parvenu en bout de course.

BLOW LAMP             « lampe à souder », par référence à la longue flamme orangée qui s’échappait de l’arrière de la tuyère et qui signalait la trajectoire des V1 la nuit.

La population britannique surnomma avec mépris l’engin DOODLE BUG (punaise idiote) et MAY BUG (hanneton), du fait que la bombe frappait aveuglément et annonçait son arrivée sur la cible par un bruit sourd et bas rappelant le vol d’un gros insecte. De leur côté, les pilotes de chasse britanniques surnommaient les V1 « BEECHKRAFT », tandis que leurs homologues alliés l’avaient baptisé « BASTARD » (bâtard). Pour les services de renseignements alliés, il n’était que P20.

Enfin, à partir du 2 novembre 1944, durant la campagne de tir à partir de la Hollande et de l’Eifel, le V1 fut parfois surnommé KRÄHE (corneille) par les Allemands, tel un oiseau de mauvaise augure.